Euh ce n'est pas mon avis, parce que je trouve qu'il y a une connotation morale dans le fait d'associer lucidité et réconciliation avec soi-même, comme si c'était un devoir que d'aller bien en toute conscience, voire de ne plus "endurer" sa présence à soi, ce qui reviendrait à butter sa conscience (tout ceux qui ont essayé diront que ce n'est pas une bonne direction pour gagner en lucidité, on a besoin de sa conscience pour vivre).
J'ai vu que les gens avaient jusque là répondu à qu'est-ce que c'est que la lucidité, plutôt qu'aux limites de la lucidité lorsqu'on perd pied. Pour ma part je dirais que la lucidité dépend de comment l'on perçoit les informations que captent notre cerveau (en gros ce l'esprit fait de ses perceptions sensorielles, de ses aperceptions et proprioceptions, est-ce qu'il les refoule ou les déni, ou les accepte et écoute ce que dit le corps ?), et comment l'on traite ces informations perçues (ce qu'on en fait en le transformant en raisonnement, en entendement).
Jung développe sa typologie sur différentes orientations, et en me calquant sur ses travaux, je dirais qu'en fonction de son type de personnalité propre (donc de sa subjectivité), plus l'on colle à ses fonctions de base, plus on est lucide. C'est à dire que plus on est en accord avec soi-même, plus sa pensée est lucide et harmonieuse. Donc dans un sens ça rejoint ce que tu dis sur le fait de se réconcilier, mais l'on peut aussi être lucide dans la confrontation avec soi-même, par exemple lorsqu'on va à l'encontre de son ego qui nous fait nous mentir à nous-même, en dévoilant quelques masques (ce qui demande un certain travail au corps, dans sa propre tête, on en revient au fait d'écouter ses perceptions à partir de ses sensations/émotions issues du corps, et de voir comment l'esprit construit une pensée lucide à partir de ses informations).
Pour en revenir à la drogue, et en abordant la lucidité sans connotation morale, par exemple les stimulants régulent nos affectent en privilégiant notre intellect. Cela ne veut pas dire que l'on est plus intelligent, mais que l'on est plus dans une dynamique d'ego en gravitant dans des états d'esprit logique ou la raison domine sur l'émotion, ce qui revient selon moi à une forme d'extra lucidité (impression de tout comprendre, de tout maitriser), sauf que la notion de vérité n'a ici pas sa place. En gros on peut réfléchir sous stim de manière supra logique tout en racontant n'importe quoi (il y a là une structure paranoïaque où l'on raisonne juste, mais sur des bases fausses, c'est le problème lorsqu'on écoute plutôt son esprit que son corps, on se ment plus facilement à soi-même en se racontant ce qui nous arrange, ego +++).
Sous psyché, quand on se laisse aller la raison est moins dominante que l'intuition (je trouve), et l'on éprouve plus facilement ses sensations/émotions que sous stims par exemple. Cette tendance intuitive fait que l'on a une vision globale des choses, qu'on a pas besoin de poser des mots sur tout comme sous stim, parce que la sensation de tout comprendre prédomine sans être dans une dynamique paranoïaque, et c'est là une autre forme de lucidité, plus spirituelle, plus immersive. Sauf qu'en revenant de ce genre de trip où on a comprit intuitivement le pourquoi du comment de l'univers, on n'est pas capable d'expliquer le phénomène...alors qu'expliquer sa défonce avec un stimulant est plus facile, parce qu'il suffit de décrire le kiffe ressenti, ce qui est plus simple et ne demande pas de notion particulière de philosophie ou de psychologie, nécessaires pour évoquer le trip psychédélique (du moins en profondeur, dans ses mécaniques psychiques).
Sous dissociatif, j'ai l'impression que le délire est plus sensitif, et que l'on a cette capacité à rentrer dans des détails microscopiques autant que s'aventurer comme sous psyché dans la matrice de l'univers, en percevant intuitivement le tout (soi dans son environnement, à l'échelle planétaire, universelle). L'attention est donc très large et la lucidité peut englober un grand nombre de chose, ou se focaliser au contraire sur une unique phénomène en le détaillant dans ses caractéristiques les plus précises et intimes. Après c'est là qu'il faut comprendre la mécanique dissociative, faisant que l'esprit peut autant être très très attentionné et supra lucide, comme totalement déconnecté et absolument pas lucide (genre breakthrough dans une phase d'ego death). Bref la lucidité sous disso c'est quitte ou double, les deux tendances opposées étant les deux faces de la même pièce, les deux contraires d'un même panel d'effet.
Et on retrouve toutes ces phases sous cannabis, cette drogue si variée sur le plan des effets (ça stimule, ça rappelle un côté psyché, et ça dissocie en inhibant ou désinhibant l'usager).
En gros mon point de vue est que la lucidité dépend surtout de son état de dissociation, en fonction de si l'on est très attentionné ou pas du tout, bref ça va ça vient par phase alternées ou intriquées, que ça soit sous stim (ou l'on est plutôt attentionné donc lucide), sous psyché où l'on est plutôt dissocié dans une phase intuitive (donc lucide mais dans une forme plus globale et peu intelligible), sous disso où là c'est quitte ou double (disons que pendant la montée on est très attentionné et lorsque l'esprit se détend on passe de On à OFF en devenant mega intuitif au point de dissoudre son ego dans une bouillie sensorielle et émotionnelle, avant de retrouver son ego, donc une part de lucidité plus mentale, plus portée sur l'intellect que l'affectif, en gros c'est la stimulation résiduelle de fin de trip, que l'on retrouve aussi sous psyché, on arrive pas à dormir et ça jacte beaucoup trop là haut).
J'espère ne pas avoir été trop confus, c'est pas évident de prime abord, faudrait que je développe tout ça dans un article prochainement.