Bon bon, je continue mon petit parcours solo à travers la terra incognita. Doutant un petit peu des choses (caléa, salvia séchées, qui donnent respectivement du thé parfaitement buvable et des chiques aussi dégueu que sans effet) qui m'ont été refilées sur un site soi-disant botanique (la bonne blague), je me dis que je vais voir ce que valent leur graines de HBW. Je zieute deux-trois trucs sur l'interoueb pour l'ingestion et je gratouille deux petites graines.
Je commence donc avec un état d'esprit plus que dubitatif. Deux graines ridicules grosses comme rien ? Je demande à voir. J'espère juste que je vais pas me ramasser une bonne chiasse ou passer les prochaines heures la tête dans les toilettes. De toute façon je sors quasiment du lit, pour un ventre vide, c'est un ventre vide.
S&S bah, chez moi, de bon matin donc. Mes précédents tests (c'est plus des tests que des trips pour l'instant) aux truffes sèches en thé, je faisais ça le soir et sur la fin, ça avait quand même tendance à devenir un peu inquiétant. Ici, pleine journée, plein soleil, allons-y. Je mâche ces deux petites idiotes l'une après l'autre. Pas fameux comme goût, mais vu la quantité, ça passe à l'aise. Mieux que les truffes de ce point de vue là, même si j'en boufferais pas un bol au petit déj' par plaisir des papilles.
Je ne bosse que demain après-midi, j'ai donc tout le temps devant moi et je peux même me permettre une nuit pourrie.
10h
Bon. Pas d'altérations visuelles (le revêtement granuleux des murs et le grand puzzle à côté de moi partent bien en live avec les truffes). Pas de sensation particulières. Je regarde dehors. Rien d'anormal. Ciel bleu. Arbres verts. Mais un vert normal, pas ce vert presque écoeurant que j'ai vu avec les truffes.
Bref, c'est normal.
Attends voir... Peut-être un peu trop normal, même. J'ai pas un panorama de folie ou une vue d'enfer sur le Mont Blanc, mon appartement au septième donne sur une rue (et un hôtel de police. Ca a son charme, en l'occurrence) pas vraiment belle. Pas vraiment moche non plus. Mais là c'est... Non mais attends, oui, c'est presque joli.
Ah. Une rue en plein soleil, au-dessous d'un ciel bleu, je trouve ça joli. Tiens donc. Je commence à ressentir cet effet de visage gonflé, de "tête un peu trop pleine" similaire à celui que me procure les truffes (pas spécialement agréable, pas insoutenable non plus). C'est bizarre, ça ne me ressemble pas. Cette rue-là, la dernière fois que je l'ai trouvé belle, c'était il y a quelques semaines pendant un orage absolument cataclysmique. Des trombes d'eau, des rafales de grêles sous les lampadaires, la foudre, le tonnerre. C'était beau. Exceptionnel, puissant et éphémère. C'est comme ça que devrait toujours se révéler la beauté, d'ailleurs : rarement, avec force, et pas de façon durable. Sinon c'est trop fastoche.
Bon ben là, cette pauvre rue banale sous son ciel bleu uni banal avec son trottoir banal, elle tape franchement dans le fastoche. Je devrais pas trouver ça beau.
Je zieute mon appart (enfin la chambre, plutôt). C'est pas très bien rangé, il y a deux trois trucs qui traînent. J'essaye de me rappeler la gueule qu'elle avait avec les truffes. Se remémorer la représentation d'un endroit sous psychédélique tout en étant sous l'influence d'un autre psychédélique, c'est pas évident.
Mais sérieusement avec les truffes, c'était pas comme ça. La perspective partait en couille, les plis des draps bougeaient, le mobilier faisait des cloques, les murs se tordaient. Là c'est joli, c'est bien. Il y a du blanc, c'est très bien, de l'imitation bois, du bleu, c'est lumineux, on est à l'aise. Par rapport au truffes par exemple, les couleurs du puzzle ne s'amusent pas à dégueuler sur le mur blanc pour vous foutre la nausée. Rien ne bouge, rien de bizarre ne se passe, c'est... C'est normal. A part cette étrange impression de beau, c'est quand même plus que léger comme effet. Mais je sens bien qu'il y a quelque chose de différent de d'habitude.
Je décide d'aller dans la salle de bain. Avec les truffes, c'était carrément à la limite du supportable, j'y allais pour faire ce que j'avais à y faire et ressortir aussi sec. Il y fait plus chaud que dans le reste de l'appart' et avec les truffes, ça devenait carrément moite, une chaleur étouffante, maladive, menaçante. Sans compter l'ampoule qui lui donnait une ambiance jaunâtre à vous filer la gerbe.
Là c'est jaune aussi. Mais c'est pas mal du tout. On s'y sent bien. Je décide de prendre une douche.
La douche est bien. L'eau est agréable, même si je pousse un peu trop sur la température. Ca m'étonne. Je médite vaguement sous les gouttes d'eau. Des images essayent de se former. Rien de très précis. Ca dure une bonne demi-heure.
Je souris pour pas grand'chose : je suis contente de pouvoir situer deux substances psyché l'une par rapport à l'autre. Les truffes, trucs incontrôlables qui déforment tellement la perception que ça vous porte sur l'estomac, et cet étrange LSA, beaucoup plus calme, avec son irrationnelle impression de beauté. Je me dis que voilà, j'ai trouvé : ce truc me fait percevoir beau. C'est pas mal. Notamment parce que je trouve le monde assez moche.
Je décide de lancer Tribes Ascend pour vérifier. Etonnée, mais pas surprise : là encore, tout s'agence bien. Surtout les commandes vocales. Et ça c'est bizarre parce que les commandes vocales dans Tribes, c'est toujours un énorme bordel sonore hilarant du début à la fin. Là aussi, mais je sais pas, c'est bien. Ca suit une structure harmonieuse (non vraiment, jouez à Tribes pour vous rendre compte à quel point ce sentiment est à côté de la plaque), tout s'emboîte bien. Quand je fais des conneries, ça ne m'énerve pas. Il y a sûrement des mecs qui me butent en boucle sur des coups de moule mais bah, pas de problème. C'est le jeu. C'est normal.
Par moments, je délaisse complètement la partie juste pour aller skier et essayer de prendre les trajectoires les plus jolies, celle qui permettent de faire de grands bonds, tout en douceur, et de retomber comme une fleur sur une belle pente, sans mouvement brusque.
Je check l'état de ma tronche dans un miroir. Pupilles, rien à signaler. Ca me surprend un peu, je suis visiblement pas dans mon état normal pourtant. Quoique ça reste diffus, pas vraiment agressif. Enfin bref.
Il doit être aux alentours de 12h30 et je me dis que le LSA, bon, c'est pas mal mais rien d'énorme non plus. D'ailleurs je crois que ça redescend déjà. Déjà que c'était pas franchement monté haut...
Comme il est encore tôt, je me refais deux petites graines avec du pain. Un peu dégueu mais pas de problème. J'en viens très sérieusement à penser à un effet placebo au vu des innombrables retours sur les gerbes party/nausées intolérables du LSA.
Et heu... Je dois reconnaître que la suite se perd un peu. Je sais pas si la montée des deux premières graines était pas finie mais alors le redrop a fait un peu plus que simplement prolonger la chose. Je suis allée me promener histoire de voir si descendre la cage d'escalier poserait problème. Oui parce qu'avec les truffes, laisse tomber : c'est confiné, on capte des voix de derrière les portes, les couleurs sont gerbantes et les fonds de couloirs flippants. Là, non, rien de tout ça. J'ai descendu joyeusement mes sept étages et je suis allée me promener. Il faisait chaud, d'habitude j'aime pas ça mais là pas de souci. Tout en me baladant, j'ai pu me rendre compte que les effets se faisaient nettement plus manifestes que le cul sur son lit. Equilibre un peu foireux, capacité d'anticipation de mec bourré : oh tiens une voiture qui aaaaaaaaaarrive okay je vais pas traverser, attends attends j'avais déjà commencé, je recule, mouèhèh sourire benêt au conducteur. Bon, je vais peut-être rentrer avant qu'on me demande ce que j'ai fumé, finalement (surtout que j'ai un oeil explosé, ça me le fait de temps en temps après des soirées de nerd - un peu douloureux, d'ailleurs). Je passe par des rues que je ne connais pas. Un peu de mal à me repérer mais ça va. Une sorte d'émerveillement idiot quand je retombe sur la place que je cherchais pour m'orienter.
Ca rend un peu con, ce truc.
Retour chez moi, un petit coup de Tribes, un petit grignotage. Très bon ce chocolat avec ce délicieux pain, hummm. Et puis le jus de fruits aussi, tiens. Même celui de pamplemousse limite imbuvable avec les truffes. Glandage sur l'ordi. J'ai toujours un oeil éclaté, qui me gêne de moins en moins (pas mal contre la douleur, le LSA). Mais bon, je me dis qu'il faudrait le laisser se reposer un peu alors je m'étale dans mon pieu, d'autant plus que je somnole à moitié et baille deux fois comme une maboul.
A ce moment, j'ai fermé les yeux. J'ai retrouvé la sensation des truffes, des sortes de vibrations dans le corps, presque comme des décharges électriques, et puis des impressions de chutes, ce genre de trucs. C'est amusant en y repensant. Je me suis allongée pour laisser mon neuneuil un peu tranquillou. Je veux dire, c'est arrivé comme ça, de façon toute bête, sans autre but que celui-ci. Et ça c'est marrant.
C'est marrant parce que j'ai eu le temps de me dire, ah, tiens dis donc petites cachottières, mais c'est presque du sérieux ma paro-
Et s'en est suivi un voyage introspectif, sans mauvais jeu de mot, proprement hallucinant.
Je m'arrête là parce que c'est bien assez et que décrire ce qui a suivi est bien au-delà de mes capacités. Peut-être plus tard, quand j'aurai plus d'expérience. Mais là, aujourd'hui ? Impossible. Les truffes c'était rigolo, y'avait les arbres qui fondaient à l'envers. J'ai pas de problème à le dire. Mais là, NOM DE DIEU. Bon allez, on se motive, ça doit être une sorte d'étape à franchir je suppose. C'est marrant de lire les types qui vous démoulent des tr complètement wtf, mais quand ça tombe sur le noob que je suis, ça a l'air d'un palier et c'est pas facile ! Allez allez. Un, deux, trois, on édite et on va se coucher en espérant que personne ne lira, voilà :
Les truffes ? Drôle. Je me suis pas sentie bizarre quand je suis venu rapporter l'expérience ici.
4 graines de hbw ? Ggggnnnnn, deux secondes ! Bon ok, j'avoue, je le reconnais : je me suis retrouvée dans un temple égyptien à essayer de causer avec Anubis. Il était pas dans un bon jour, faut croire, le dialogue a été difficile. Mais il est probable qu'on se revoit. Pas tout de suite, par contre, ouch.
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J'aurais encore plein de trucs à dire mais ça commence à faire vachement long. Quoi qu'il en soit, tout mon respect va à ces insignifiantes petites graines. Bluffant. Des perspectives fascinantes. J'ai trouvé, me semble-t-il, une réponse incroyable. Pas une révélation trippesque et complètement illusoire, non, une vraie réponse a posteriori : oui, on peut essayer de prendre le contrôle d'un trip. Ca semble difficile, mais possible. Et ça, c'est mon authentique révélation du jour. Même si j'ai l'air bête en l'écrivant vu que plein de gens l'ont déjà répété sur ce forum.
Bonne nuit.