Procyon
Glandeuse pinéale
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- 29 Mar 2014
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Le week-end dernier, à Paris. Première expérience psychédélique avec quelqu'un d'autre (en général je suis toujours seul), au LSD, et le moins qu'on puisse dire c'est que ça ne m'a pas vraiment réussi.
J'ai droppé vers 16h, et j'étais avec un bon ami qui a partagé un buvard avec moi. Au beau milieu de la montée, j'ai commencé à ne plus le percevoir comme mon ami, dès que je le regardais c'était mon visage que je voyais à la place du sien. À ce moment-là, je n'ai pas paniqué... de son côté, il ressentait comme un genre d'"aura" qui émanait de moi, une attirance : on en a déduit ensemble que chacun voyait en l'autre une image de lui-même dans laquelle il se reconnaissait, et le trip a continué paisiblement. Pour lui, tout est allé parfaitement bien ; pour moi, ce n'était que la première étape.
Au bout de quelques heures, j'ai commencé à ressentir une vraie parano. Tout me faisait peur, et encore plus la présence de mon pote à mes côtés. Je le percevais toujours comme moi, mais plus je le regardais et plus cette image de moi me répugnait, je haïssais cette image qu'il me renvoyait et je haïssais encore plus son comportement, ses gestes, tout ce qu'il faisait : une petite partie encore consciente de moi-même m'a empêché d'extérioriser tout ça, et je me suis contenté de me battre contre cette haine incompréhensible de ce pote - que pourtant j'adore.
À la nuit tombée, nous avons bougé, et c'est là que j'ai commencé à ressentir un mélange de parano et d'extase. La partie consciente et responsable de moi-même voulait veiller sur mon pote, s'assurer qu'il vive le meilleur trip possible et que rien de négatif ne vienne le gêner, et se battait dans le même temps contre la partie parano qui tentait de prendre le dessus. Toute présence humaine était terrifiante, je ne pouvais même pas observer le (magnifique) ciel trois pauvres secondes, de crainte que quelqu'un s'approche, ou que je perde mon pote de vue (complètement absurde mais pas tellement contrôlé).
Et puis nous nous sommes mis à marcher dans les allées presque vides de Vincennes. Et nous avons continué à parler ensemble. C'est à ce moment-là que j'ai commencé à ressentir une légère dépersonnalisation ; j'avais dîné la veille au soir avec un mec que j'aime beaucoup, et dont j'aime encore plus la manière de parler, et maintenant c'était comme si... ce mec parlait par ma bouche. Ce n'était plus Procyon qui s'exprimait, c'était les idées de Procyon qui étaient modifiées et exprimées par T. (le mec en question). Et plus le temps passait, plus cette dépersonnalisation devenait forte : T. prenait le contrôle de mon corps et même d'une part de mon esprit.
Nous nous sommes arrêtés plusieurs fois pour discuter, longuement, mais je commençais à m'habituer à mes sensations et surtout à pouvoir m'exprimer presque normalement. Nous étions en milieu-fin de plateau, je dirais. Donc j'ai expliqué à mon pote une partie de ce que je ressentais, surtout ce combat mental contre T. Au final, plus l'expérience avançait, plus il m'arrivait d'interrompre mes phrases pour crier "Mais c'est pas moi qui parle là, c'est T., c'est T. !". Puis à un moment j'ai rajouté "Putain!" à la fin d'une de ces phrases, et je me suis rendu compte que ce qui différenciait vraiment mon élocution de celle de T., c'était l'emploi d'insultes et d'expressions plus fleuries les unes que les autres. Donc j'ai commencé à en mettre partout, à la fin de presque chaque phrase, mais ça m'est vite sorti de la tête et T. se faisait de plus en plus agressif.
Pendant une bonne moitié de l'expérience, mon cerveau m'a complètement empêché de percevoir tout ça comme un bad trip (responsabilité ou aveuglement ?), et puis pendant la descente (le retour à l'appart, toujours avec mon pote) j'ai commencé à comprendre... et à partir du moment où je me suis dit "mais je suis en train de faire un bad trip en fait ?" ça a été de pire en pire jusqu'à ce que je sois complètement redescendu, au beau milieu de la nuit (environ 14-15h après le drop, à la louche).
Jusqu'à ce moment-là, j'étais submergé de pensées négatives, la haine complètement incompréhensible contre mon pote, la peur de moi-même, la peur des murs, la peur des portes fermées, la peur du noir (surtout ça, j'ai pas réussi à éteindre la lumière), et pas mal d'autres trucs dont je ne me rappelle pas forcément, mais par-dessus tout la crainte de ne jamais redescendre, de rester "dépersonnalisé", vidé de ma capacité à m'exprimer et à agir par moi-même, enfermé dans une prison mentale infranchissable.
Bon, au final, j'ai pris mon mal en patience et j'ai décidé d'ignorer ça, mais c'est pas forcément évident. En tout cas, le lendemain matin, c'était presque parti et je ne parlais plus "en tant que T.", tout avait disparu... tout, sauf la haine, une haine inexplicable qui s'opposait à mon affection presque fraternelle pour ce pote, et contre laquelle j'ai encore dû lutter pendant deux ou trois jours.
De la même manière qu'il est impossible d'imaginer à quoi "ressemble" un trip psychédélique avant d'en avoir vécu un, je crois qu'il est impossible d'imaginer ce que c'est de faire un bad trip, de boucler sur des pensées négatives, avant d'avoir expérimenté la chose par soi-même.
Mais c'est difficile de se protéger contre un danger qu'on ne peut pas imaginer. En tout cas, même si c'était ultra désagréable, ça m'a bien remis en place autant pour la confiance en moi que pour la confiance en la molécule. Beaucoup trop de confiance et pas assez de méfiance, tout ça en n'étant pas seul en plus et avec un mindset pas forcément idéal... danger ! Je crois que j'ai compris la leçon, en tout cas.
Bon je voulais juste écrire quelques lignes mais au final j'ai un peu débordé. J'avais besoin de l'extérioriser un peu sans perdre de temps à faire un "vrai" gros TR (même si ça arrivera peut-être un jour, mais je me rends compte que j'ai déjà raconté la partie la plus intéressante de l'expérience). J'espère juste que c'est pas trop ardu à lire aha, j'en ai rajouté un peu dans tous les sens à mesure que ça me venait. Merci à ceux qui auront eu le courage en tout cas.
J'ai droppé vers 16h, et j'étais avec un bon ami qui a partagé un buvard avec moi. Au beau milieu de la montée, j'ai commencé à ne plus le percevoir comme mon ami, dès que je le regardais c'était mon visage que je voyais à la place du sien. À ce moment-là, je n'ai pas paniqué... de son côté, il ressentait comme un genre d'"aura" qui émanait de moi, une attirance : on en a déduit ensemble que chacun voyait en l'autre une image de lui-même dans laquelle il se reconnaissait, et le trip a continué paisiblement. Pour lui, tout est allé parfaitement bien ; pour moi, ce n'était que la première étape.
Au bout de quelques heures, j'ai commencé à ressentir une vraie parano. Tout me faisait peur, et encore plus la présence de mon pote à mes côtés. Je le percevais toujours comme moi, mais plus je le regardais et plus cette image de moi me répugnait, je haïssais cette image qu'il me renvoyait et je haïssais encore plus son comportement, ses gestes, tout ce qu'il faisait : une petite partie encore consciente de moi-même m'a empêché d'extérioriser tout ça, et je me suis contenté de me battre contre cette haine incompréhensible de ce pote - que pourtant j'adore.
À la nuit tombée, nous avons bougé, et c'est là que j'ai commencé à ressentir un mélange de parano et d'extase. La partie consciente et responsable de moi-même voulait veiller sur mon pote, s'assurer qu'il vive le meilleur trip possible et que rien de négatif ne vienne le gêner, et se battait dans le même temps contre la partie parano qui tentait de prendre le dessus. Toute présence humaine était terrifiante, je ne pouvais même pas observer le (magnifique) ciel trois pauvres secondes, de crainte que quelqu'un s'approche, ou que je perde mon pote de vue (complètement absurde mais pas tellement contrôlé).
Et puis nous nous sommes mis à marcher dans les allées presque vides de Vincennes. Et nous avons continué à parler ensemble. C'est à ce moment-là que j'ai commencé à ressentir une légère dépersonnalisation ; j'avais dîné la veille au soir avec un mec que j'aime beaucoup, et dont j'aime encore plus la manière de parler, et maintenant c'était comme si... ce mec parlait par ma bouche. Ce n'était plus Procyon qui s'exprimait, c'était les idées de Procyon qui étaient modifiées et exprimées par T. (le mec en question). Et plus le temps passait, plus cette dépersonnalisation devenait forte : T. prenait le contrôle de mon corps et même d'une part de mon esprit.
Nous nous sommes arrêtés plusieurs fois pour discuter, longuement, mais je commençais à m'habituer à mes sensations et surtout à pouvoir m'exprimer presque normalement. Nous étions en milieu-fin de plateau, je dirais. Donc j'ai expliqué à mon pote une partie de ce que je ressentais, surtout ce combat mental contre T. Au final, plus l'expérience avançait, plus il m'arrivait d'interrompre mes phrases pour crier "Mais c'est pas moi qui parle là, c'est T., c'est T. !". Puis à un moment j'ai rajouté "Putain!" à la fin d'une de ces phrases, et je me suis rendu compte que ce qui différenciait vraiment mon élocution de celle de T., c'était l'emploi d'insultes et d'expressions plus fleuries les unes que les autres. Donc j'ai commencé à en mettre partout, à la fin de presque chaque phrase, mais ça m'est vite sorti de la tête et T. se faisait de plus en plus agressif.
Pendant une bonne moitié de l'expérience, mon cerveau m'a complètement empêché de percevoir tout ça comme un bad trip (responsabilité ou aveuglement ?), et puis pendant la descente (le retour à l'appart, toujours avec mon pote) j'ai commencé à comprendre... et à partir du moment où je me suis dit "mais je suis en train de faire un bad trip en fait ?" ça a été de pire en pire jusqu'à ce que je sois complètement redescendu, au beau milieu de la nuit (environ 14-15h après le drop, à la louche).
Jusqu'à ce moment-là, j'étais submergé de pensées négatives, la haine complètement incompréhensible contre mon pote, la peur de moi-même, la peur des murs, la peur des portes fermées, la peur du noir (surtout ça, j'ai pas réussi à éteindre la lumière), et pas mal d'autres trucs dont je ne me rappelle pas forcément, mais par-dessus tout la crainte de ne jamais redescendre, de rester "dépersonnalisé", vidé de ma capacité à m'exprimer et à agir par moi-même, enfermé dans une prison mentale infranchissable.
Bon, au final, j'ai pris mon mal en patience et j'ai décidé d'ignorer ça, mais c'est pas forcément évident. En tout cas, le lendemain matin, c'était presque parti et je ne parlais plus "en tant que T.", tout avait disparu... tout, sauf la haine, une haine inexplicable qui s'opposait à mon affection presque fraternelle pour ce pote, et contre laquelle j'ai encore dû lutter pendant deux ou trois jours.
De la même manière qu'il est impossible d'imaginer à quoi "ressemble" un trip psychédélique avant d'en avoir vécu un, je crois qu'il est impossible d'imaginer ce que c'est de faire un bad trip, de boucler sur des pensées négatives, avant d'avoir expérimenté la chose par soi-même.
Mais c'est difficile de se protéger contre un danger qu'on ne peut pas imaginer. En tout cas, même si c'était ultra désagréable, ça m'a bien remis en place autant pour la confiance en moi que pour la confiance en la molécule. Beaucoup trop de confiance et pas assez de méfiance, tout ça en n'étant pas seul en plus et avec un mindset pas forcément idéal... danger ! Je crois que j'ai compris la leçon, en tout cas.
Bon je voulais juste écrire quelques lignes mais au final j'ai un peu débordé. J'avais besoin de l'extérioriser un peu sans perdre de temps à faire un "vrai" gros TR (même si ça arrivera peut-être un jour, mais je me rends compte que j'ai déjà raconté la partie la plus intéressante de l'expérience). J'espère juste que c'est pas trop ardu à lire aha, j'en ai rajouté un peu dans tous les sens à mesure que ça me venait. Merci à ceux qui auront eu le courage en tout cas.