Trancelucid
Neurotransmetteur
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Vous trouverez ci dessous, un texte écrit il y a quelques semaines de cela, témoignant de l’expérience la plus exaltante que j'ai pu vivre sous psychotropes. L'individu désignée dans le texte par la seconde personne du singulier est en quelque sorte mon compagnon d’expériences psychédéliques. Nous avions, ce jour la, pris deux gouttes d'acide chacun, en pleine rue, à 15 minutes de chez moi en voiture.
Bonne lecture

Il n’y a rien au monde qui ne puisse surpasser le LSD. Rien de plus fort, de plus puissant, de plus exaltant, de plus merveilleux. Le LSD est au-delà de l’imaginable, du nommable, du possible. Le plus beau de tous les voyages. Infini.
Gouttes dans ma bouche. La roue est tournée. Il est désormais impossible de revenir en arrière, impossible de revenir sur ses pas. Le LSD est un maitre sans appel auquel on a d’autre choix que de s’offrir tout entier, de renoncer à son enveloppe charnelle et à sa raison. Un maitre redoutable, que rien ne peut égaler. Une fois que la substance se mêle à la salive, pénètre la gorge, il n’y a plus rien à faire qu’attendre. Attendre le décollage, l’ouverture de ces portes qui, une fois franchis, se referment inévitablement, sans chance de retour.
Il y a des gens, chez moi. Des gens qui ont bis de l’alcool, et qui semblent de pas vouloir partir. Le LSD s’est emparés de nos prisons charnelles il y a suffisamment longtemps, et la montée est proche. Je peux la sentir, en moi, bouillonnante, et puissante. Mon corps devient un volcan et l’éruption est proche. Il faut faire vite. Une lucidité me prends. Ces gens ne peuvent pas rester. Leur présence est absurde, inconcevable. Ils ne parlent pas même français, ils sont trop loin de nous, dans tout. Interférences néfastes. Ils nous inondent de questions. J’ai chaud, je bouillonne. Je me sens proche de la fin, et rien n’est prêt. Cette lucidité étrange qui me régit désormais me siffle à l’oreille qu’ils doivent s’en aller. Un peu comme un instinct de survie, de la même lignée que cette dérangeante impression que l’on a, avant qu’une inévitable catastrophe n’ait lieu.
Je cherche à capter ton regard ; je me sens vulnérable. Mes yeux te supplient de faire quelque chose. Trop tard, je suis en train de mourir. Mon esprit se condense, mon corps me démange, convulse de l’intérieure, m’enlise violement vers un ailleurs inviolable. Je me détache de tout. Et ils ne comprennent rien. J’essaie de me réfugier tout contre toi, comme pour me contenir, comme si tu étais devenu mon seul repère dans ce chaos confus. Les autres ne comprennent pas, interprètent de manière erronée, posent des questions à la chaîne, nous scrutent étrangement.Je suis prise d’un rire nerveux, interminable. Toi aussi. Un rire qui camoufle notre vulnérabilité, notre incapacité à agir, notre besoin de solitude, notre souffrance face à l’incompréhension, à la distance destructrice qui nous séparent de ces autres qui ne sont désormais plus que le reflet d’une réalité morne et conformiste, d’hommes aux regards pesant, lourds d’aprioris, et d’idée reçu. Je ris, et pleure en même temps. Mon corps s’arrache. Je tente de fuir, tout est trop fort, trop violent, j’aimerais être seul avec toi, et oublier les carcans du quotidien de l’homme, du pitoyable égo du monde.
Je te prends par la main, et t’entraîne dans une autre pièce, et ne désire plus rien d’autre que mourir dans la solitude, avant de renaître dans cet univers étrange gouverné par le suprême Acide. Les murs sont mouvants, et les lumières s’éclaircissent. Je t’en fais pars. Je veux qu’ils s’en aillent. Ils débarquent encore. Ils sont oppressants, lourds. Ils sont les entraves et nous nous dirigeons vers la liberté absolue.
Ils sont enfin partis, disent qu’ils reviendront. Nous fermons le porte derrière nous, avant même qu’ils n’aient pu monter dans l’ascenseur. Nous fermons la porte, et nous pénétrons l’autre côté. C’est ici même que la célèbre phrase de Adouls Huxley prend tout son sens. « Lorsque les portes de la perception sont nettoyés, alors toute chose apparait à l’homme tel quel est réellement, infini. » Je ne suis juste plus rien d’autre que la continuité d’une harmonie sans pareil. Je ne suis plus un corps, un nom, un esprit. Je deviens partie de ce tout, à la même échelle que les murs mouvants, les peintures qui se déclinent, les lumières qui me dévorent, la musique transcendante. Le réel est aboli, et je me noie dans l’absurde. Il est impossible de parler, de penser. Les formes me fascinent, et je deviens les formes. Je ne m’appartiens plus. La beauté de cet univers me fait mal. La lumière, trop rouge, et ses mouvements ondulants, cette énergie formidable, incandessante, et la musique qui devient la couleur. J’ai envie de pleurer, de hurler de bonheur, l’émotion est trop forte. Je ne suis plus qu’émotion. Je suis l’étrange mélange de la déchirure ardente, du désespoir sans fin, et du bonheur intense, orgasmique. J’ai mal de plénitude.
Ta présence fait partie de moi, au même titre que tout le reste. Nous ne voyageons pas ensemble, et pourtant nous sommes là, tu es moi, comme tu es la mélodie, les nuances de rouges, et de violet, la lumière même. L’environnement dans lequel nous évoluons est un poème absurde. Nous nous contenons dans cette fusion de vivante, et c’est l’ataraxie. Nous n’avons plus de désir, plus de besoins. Nous sommes loin de nos névroses, de notre moi. La perfection est partout, et les repères sont abolis. Il est impossible de mettre des séparations aux choses, de se limiter à quoi que ça soit. Il n’y a rien de concret, de logique, de rationnel.
Je me touche le corps, me caresse le visage, les bras, et les épaules, comme pour me prouver que je suis encore la. Qu’il y a quelque chose qui possède mon esprit. Autrement, il est impossible de se dissocier du son, ou du visuel. L’être et le devenir disparaissent pour laisser place à l’accompli, à l’effervescence de l’âme, à la profusion de ce soit qui n’est plus que l’essence de l’émotion elle-même.
Tu te tords dans la musique. Tu souffres de plaisir, te lacères les bras. Nous nous tenons la main. Les paroles n’ont plus lieu d’être. Il n’y a plus de limites dans les choses. Je suis la continuité du sol, de tes doigts, et de l’infini. Le miroir m’attire. Je m’y affronte. Mon reflet n’est pas moi. Le visage dépossédé qui se dresse face à moi est d’une beauté sans égale. Les larmes qui coulent de ces paupières se transforment en racines d’or, et engloutissent la peau et les lèvres. Je sens le danger de cette confrontation sans pour autant y goûter. C’est fort. Les cheveux deviennent le cadre de bois.
Mes mains dessinent des formes sur le mur ondulant. Les courbes qui s’estompent sur les pierres sont merveilleusement clair, terriblement palpables. Mes doigts sont la couleur, qui se décline en un milliard de nuances. Le spectacle est formidable, Je suis maintenant ce mur, et ces dessins. Voutes violettes. Dessiner deviens philosophique. Ces formes qui naissent de nuls part viennent s’ajouter à l’harmonie perpétuelle, rejoindre le mouvement, le tout. Tout y a sa place. Tout a son importance. Chaque molécule est perceptible.
Le temps n’est plus. Il est impossible de le deviner, de le contrôler, de le comprendre. Le temps est mort avec les limites de toutes choses. Il n’y a qu’un vide, intensément douloureux, inlassablement dérangeant. Nous nageons dans l’essence du sublime.
Je ferme les yeux, pour mieux appartenir à la musique, au souffle des notes, à la transcendance du rythme. Je m’ondule de douleur, devant tant de beauté, me déchire avec le tempo. La musique est montante, puissante. Je vibre de plaisir, de désarroi, de bonheur et de peine. La puissance émotive est tel que je m’arrache le corps. Comme pour la condenser sans y parvenir. La musique devient le monde. Les rires, l’enfance, les tristesses, la force, les cieux, le rêve, la fuite, l’extase.
Ta main posée sur mon ventre me caresse. Je me transforme en ta peau, en la mienne, et en ta caresse. Je ne suis plus rien d’autre qu’un mouvement tactile. Ta chaleur m’englouti, me dévore, me blesse et m’apaise. Ta main brule entre mes cuisses. Je deviens le plaisir intense, l’orgasme dérangeant, l’orgasme avant l’orgasme, l’orgasme perpétuel. Nos chairs fusionnent, et nous ne sommes plus qu’un. Il est terriblement bon de te sentir à l’intérieur de mon être. De percevoir le moindre mouvement, d’y résister, d’en souffrir, d’exploser à chaque ondulation, de vivre ton plaisir, de te savoir devenir le mien. Le frottement de nos chairs est à la limite du supportable. A la limite de la folie. L’exaltation est d’une puissance tempétueuse.
Le LSD, c’est l’osmose. Le tout. L’harmonie. La puissance. L’émotion . Quoi de plus beau que de se noyer dans l’infini ?