Cadre : parfait, un festival de trance, qualité du son incroyable, un artiste que j'aime bien joue vers 3h du matin. Mes meilleurs amis sont là, je suis en forme, très enthousiaste à l'idée de reprendre du lsd après un an. Tout va bien dans ma vie à présent, mais je viens de vivre une année très éprouvante, avec insomnies, crises d'angoisses, surmenage, dépression (j'aurais dû m'en souvenir, mais je m'en suis sortie alors...). C'est mon quatrième trip. J'en ai vécu un très intense (hallucinations vraiment très présentes, synesthésie, dissociation de mon être en plusieurs entités) et deux autres plus légers (réflexion sur-motivée, légères déformations, musique transcendée), avec respectivement un carton, et deux fois un demi carton.
Je suis prudente et prend un demi carton, après avoir demandé au type si un quart suffirait (il me répond que non, mais que ces cartons sont forts)
Deux amis en prennent avec moi, trois autres n'en prennent pas, ils pourront donc nous surveiller un peu si nous sommes trop désorientés. Un de mes amis n'a eu aucun effet, mon autre amie a vraiment galéré (comme moi), mais a fini par vomir, ce qui a écourté quelque peu le trip.
J'ai pris le carton à 23h30, en pensant m'embarquer dans 8h de trip (je n'ai jamais vécu de trip plus long).
Voici mes impressions, elles sont un peu longues, j'ai beaucoup de mal à les démêler, et à digérer cette expérience qui a rapidement mal viré, malgré des conditions idéales. Je m'excuse pour le déballage de vie.
J'ai été la virgule de l'univers au bout de l'orbe du son.
L'égo éclaté comme une bulle, disparu, dissipé par la musique, l'ultime percussion au bout de la mesure comme un point à mon existence.
Comment savoir où je suis si je n'existe plus?
Comment sentir que je suis lorsque je me sens évanouie dans l'univers, anéantie par le cosmos à côté duquel je ne suis rien, un atome, une énergie infinitésimale, seulement une partie, et non pas une entité?
Je suis une poussière dans l'édifice, invisible et bientôt mélangée à tout, perdue dans tout.
Je veux revenir pourtant, je veux retrouver mon petit individu dérisoire.
J'ai aimé la plénitude et je l'ai haïe. Je l'ai haïe de me dérober la conscience de la vivre. Je me suis haïe de ne pas accepter de n'être plus rien. Incapable.
La colère et l'angoisse, mes douces soeurs, si familières, m'ont envahie peu à peu, lorsque je me suis assez retrouvée pour leur tendre la main.
Sors de mon corps, je ne veux plus voir le sol trembler, la sève du monde couler sous ma peau, les visages de mes amis qui se déssechent parce que tout mon être sens l'épuisement de leur corps et craint qu'ils ne vieillissent et meurent instantanément.
Je ne sais pas les repousser, les visions, les angoisses.
Plus j'angoisse, plus je trippe. Je déteste la vue des nuages qui forment de magnifiques volutes. Non je ne veux pas rigoler, je ne veux pas m'amuser, ce n'est pas drôle. J'aurais voulu que cette expérience épuisante s'arrête et me laisse à mon sommeil, le sommeil qui fait comprendre et digérer. Comme les autres fois, et sinon le sommeil, du moins le repos, pouvoir rester allongée et jouir de la chaleur du duvet, de la proximité des amis qui eux aussi essayent de prendre du repos. J'aurais voulu pouvoir réfléchir sereinement à ce que je venais de vivre, mais l'angoisse efface ma mémoire, elle me fait oublier l'intérêt de tout ça, elle me persuade que la plénitude a été essentiellement effrayante, qu'elle me coupera du monde à jamais, que je ne pourrai plus jamais être moi.
Comment mon corps peut-il supporter ça? Au bout de tant de temps, cela fait presque douze heures, mon coeur va lâcher, mon corps va m'abandonner, si j'essaye de dormir je meurs, si je dors dans le trip je m'enterre dedans. Si seulement je sentais que cela descendait progressivement, je pourrais me rassurer, je me dirais que c'est un processus continu et logique, un escalier que l'on emprunte marche après marche, lentement, dans le noir, en s'accrochant à la rambarde, en s'efforçant.
J'ai besoin d'être rassurée, que l'on me parle constamment. Non tu ne vas pas mourir. Pauvre conne, tu emmerdes tout le monde, même pas capable de te calmer, tout le monde te dit que c'est bientôt fini, qu'ils sont là pour toi, et tu t'enfermes dans ton angoisse comme si tu tenais à faire ton petit scandale de petite égoïste.
J'appelle mon amoureux. Sa voix me donne envie de pleurer. Je vais le décevoir il ne m'aimera plus jamais. Tout ceux qui m'ont vue ne pourront plus jamais m'aimer. Sa voix me rassure tellement. Je regarde son nom cousu dans le duvet qu'il m'a prêté, qui me réconforte. Tu existes et je t'aime, je ne pourrai jamais assez t'aimer. Je dois essayer d'être digne de toi, d'être forte pour mes amis, empêcher qu'il n'en viennent à me détester.
Pendant un instant je crois que je vais y parvenir mais je regarde l'heure. Plus de douze heures. Et ça repart de plus belle. Je vois des corps nus qui s'enculent sur des voitures tunées à chaque fois que je ferme les yeux. La beauferie atroce, l'antithèse de toute cette beauté que le trip a pu m'inspirer, au moins l'espace d'une seconde. Et si j m'étais trompée? Et si ce n'était qu'une putain de cochonnerie comme une autre, comme une putain de trace de speed parfaitement inutile, qui te fait prendre conscience que tu n'es qu'une pauvre merde, que tu n'as pas envie de prendre ça de toute manière. Pourtant j'avais vraiment envie, je repensais à mon premier trip, le mystère du tremblement de l'être, l'ivresse de la synesthésie et de la musique qui se matérialise, l'angoisse du questionnement de soi aussi, mais une saine angoisse, prête à être évacuée, prête à proposer une solution pour la réguler. J'en avais beaucoup appris sur moi, mais pas cette fois-ci.
Je suis à l'hôpital et je crois que je vais crever. J'ai tellement peur de crever putain. Lorsque mes amis partent j'ai l'impression de creuser ma tombe. Je hurle, je crois que le médecin veut m'euthanasier lorsqu'il retire un bout d'herbe de mes cheveux. J'ai peur qu'on me donne quelque chose sans me prévenir.
Je crois que j'ai peur d'arrêter de tripper. J'ai conscience que ce que j'ai vécu ne me permettra pas de fonctionner normalement, d'évoluer dans la réalité. Je ne peux pas avoir été la virgule de l'univers et redevenir moi.
J'aurais pu me contrôler, j'aurais pu réguler tout ça et je m'en veux, je m'en veux d'avoir été un poids, un petit être ridiculement attaché à son ego, prête à tout, à tordre le cou à sa dignité pour s'en sortir. Je dis à l'infirmier que je n'ai plus de dignité. Son regard est tellement gentil que je me sens mal, le trip rend ses yeux très beaux et je me déteste de l'emmerder comme ça.
Je continue de tripper sous anxiolytiques et je ne pense qu'à lui, mon amoureux, il va venir me chercher, il va me prendre dans ses bras.
Je ne mérite pas son amour. Je mérite qu'on m'euthanasie. Je le dis au médecin.
Capable de réussir des putains de concours, d'attaquer un doctorat et pas capable de laisser aller un putain de trip. Pauvre merde. Tu ne vaux rien, tu n'as rien accompli.
Les anxiolytiques me feraient presque apprécier de tripper encore. Je me déteste à cette pensée.
Il est 20h, mon amoureux arrive. Je trippe encore, cela fait 18h. Sa présence me fait un peu redescendre. En tout cas elle m'apaise. J'ai honte de moi, je sens que je ne suis pas loin d'être normale, que j'ai foutu la merde pour rien. J'ai honte et je m'en veux.
C'est l'impression qui perdure aujourd'hui. Un somnifère plus tard je ne trippe plus. J'ai de la fièvre et je m'en veux, je regrette. Je voudrais pouvoir saisir l'aspect bénéfique de cette expérience, retenir les belles sensations et laisser aller l'horreur. Je me suis rappelée que je me sens coupable d'exister et indigne de tout, que je m'accroche à la vie comme une mauvaise herbe. Rien de nouveau, ce n'est qu'une piqûre de rappel. A force d'être heureuse j'avais oublié que je ne le méritais pas.
Moi qui croyais que je pouvais devenir meilleure...
Je suis désolée, c'est un peu noir et pessimiste comme vision. Suite à ce trip j'ai décidé de ne plus jamais prendre de lsd, peut-être même de drogue tout court (je ne prends plus de md, coke, speed, etc., je ne fume pas mais j'ai bien aimé quelques trips aux champignons). Une partie de moi en est triste cependant... c'était incroyable d'être la virgule de l'univers.
Mais surtout... je suis perdue... qu'est-ce que je peux tirer de ce putain de trip qui me laisse aux prises avec des informations absolument contradictoires?
Je suis prudente et prend un demi carton, après avoir demandé au type si un quart suffirait (il me répond que non, mais que ces cartons sont forts)
Deux amis en prennent avec moi, trois autres n'en prennent pas, ils pourront donc nous surveiller un peu si nous sommes trop désorientés. Un de mes amis n'a eu aucun effet, mon autre amie a vraiment galéré (comme moi), mais a fini par vomir, ce qui a écourté quelque peu le trip.
J'ai pris le carton à 23h30, en pensant m'embarquer dans 8h de trip (je n'ai jamais vécu de trip plus long).
Voici mes impressions, elles sont un peu longues, j'ai beaucoup de mal à les démêler, et à digérer cette expérience qui a rapidement mal viré, malgré des conditions idéales. Je m'excuse pour le déballage de vie.
J'ai été la virgule de l'univers au bout de l'orbe du son.
L'égo éclaté comme une bulle, disparu, dissipé par la musique, l'ultime percussion au bout de la mesure comme un point à mon existence.
Comment savoir où je suis si je n'existe plus?
Comment sentir que je suis lorsque je me sens évanouie dans l'univers, anéantie par le cosmos à côté duquel je ne suis rien, un atome, une énergie infinitésimale, seulement une partie, et non pas une entité?
Je suis une poussière dans l'édifice, invisible et bientôt mélangée à tout, perdue dans tout.
Je veux revenir pourtant, je veux retrouver mon petit individu dérisoire.
J'ai aimé la plénitude et je l'ai haïe. Je l'ai haïe de me dérober la conscience de la vivre. Je me suis haïe de ne pas accepter de n'être plus rien. Incapable.
La colère et l'angoisse, mes douces soeurs, si familières, m'ont envahie peu à peu, lorsque je me suis assez retrouvée pour leur tendre la main.
Sors de mon corps, je ne veux plus voir le sol trembler, la sève du monde couler sous ma peau, les visages de mes amis qui se déssechent parce que tout mon être sens l'épuisement de leur corps et craint qu'ils ne vieillissent et meurent instantanément.
Je ne sais pas les repousser, les visions, les angoisses.
Plus j'angoisse, plus je trippe. Je déteste la vue des nuages qui forment de magnifiques volutes. Non je ne veux pas rigoler, je ne veux pas m'amuser, ce n'est pas drôle. J'aurais voulu que cette expérience épuisante s'arrête et me laisse à mon sommeil, le sommeil qui fait comprendre et digérer. Comme les autres fois, et sinon le sommeil, du moins le repos, pouvoir rester allongée et jouir de la chaleur du duvet, de la proximité des amis qui eux aussi essayent de prendre du repos. J'aurais voulu pouvoir réfléchir sereinement à ce que je venais de vivre, mais l'angoisse efface ma mémoire, elle me fait oublier l'intérêt de tout ça, elle me persuade que la plénitude a été essentiellement effrayante, qu'elle me coupera du monde à jamais, que je ne pourrai plus jamais être moi.
Comment mon corps peut-il supporter ça? Au bout de tant de temps, cela fait presque douze heures, mon coeur va lâcher, mon corps va m'abandonner, si j'essaye de dormir je meurs, si je dors dans le trip je m'enterre dedans. Si seulement je sentais que cela descendait progressivement, je pourrais me rassurer, je me dirais que c'est un processus continu et logique, un escalier que l'on emprunte marche après marche, lentement, dans le noir, en s'accrochant à la rambarde, en s'efforçant.
J'ai besoin d'être rassurée, que l'on me parle constamment. Non tu ne vas pas mourir. Pauvre conne, tu emmerdes tout le monde, même pas capable de te calmer, tout le monde te dit que c'est bientôt fini, qu'ils sont là pour toi, et tu t'enfermes dans ton angoisse comme si tu tenais à faire ton petit scandale de petite égoïste.
J'appelle mon amoureux. Sa voix me donne envie de pleurer. Je vais le décevoir il ne m'aimera plus jamais. Tout ceux qui m'ont vue ne pourront plus jamais m'aimer. Sa voix me rassure tellement. Je regarde son nom cousu dans le duvet qu'il m'a prêté, qui me réconforte. Tu existes et je t'aime, je ne pourrai jamais assez t'aimer. Je dois essayer d'être digne de toi, d'être forte pour mes amis, empêcher qu'il n'en viennent à me détester.
Pendant un instant je crois que je vais y parvenir mais je regarde l'heure. Plus de douze heures. Et ça repart de plus belle. Je vois des corps nus qui s'enculent sur des voitures tunées à chaque fois que je ferme les yeux. La beauferie atroce, l'antithèse de toute cette beauté que le trip a pu m'inspirer, au moins l'espace d'une seconde. Et si j m'étais trompée? Et si ce n'était qu'une putain de cochonnerie comme une autre, comme une putain de trace de speed parfaitement inutile, qui te fait prendre conscience que tu n'es qu'une pauvre merde, que tu n'as pas envie de prendre ça de toute manière. Pourtant j'avais vraiment envie, je repensais à mon premier trip, le mystère du tremblement de l'être, l'ivresse de la synesthésie et de la musique qui se matérialise, l'angoisse du questionnement de soi aussi, mais une saine angoisse, prête à être évacuée, prête à proposer une solution pour la réguler. J'en avais beaucoup appris sur moi, mais pas cette fois-ci.
Je suis à l'hôpital et je crois que je vais crever. J'ai tellement peur de crever putain. Lorsque mes amis partent j'ai l'impression de creuser ma tombe. Je hurle, je crois que le médecin veut m'euthanasier lorsqu'il retire un bout d'herbe de mes cheveux. J'ai peur qu'on me donne quelque chose sans me prévenir.
Je crois que j'ai peur d'arrêter de tripper. J'ai conscience que ce que j'ai vécu ne me permettra pas de fonctionner normalement, d'évoluer dans la réalité. Je ne peux pas avoir été la virgule de l'univers et redevenir moi.
J'aurais pu me contrôler, j'aurais pu réguler tout ça et je m'en veux, je m'en veux d'avoir été un poids, un petit être ridiculement attaché à son ego, prête à tout, à tordre le cou à sa dignité pour s'en sortir. Je dis à l'infirmier que je n'ai plus de dignité. Son regard est tellement gentil que je me sens mal, le trip rend ses yeux très beaux et je me déteste de l'emmerder comme ça.
Je continue de tripper sous anxiolytiques et je ne pense qu'à lui, mon amoureux, il va venir me chercher, il va me prendre dans ses bras.
Je ne mérite pas son amour. Je mérite qu'on m'euthanasie. Je le dis au médecin.
Capable de réussir des putains de concours, d'attaquer un doctorat et pas capable de laisser aller un putain de trip. Pauvre merde. Tu ne vaux rien, tu n'as rien accompli.
Les anxiolytiques me feraient presque apprécier de tripper encore. Je me déteste à cette pensée.
Il est 20h, mon amoureux arrive. Je trippe encore, cela fait 18h. Sa présence me fait un peu redescendre. En tout cas elle m'apaise. J'ai honte de moi, je sens que je ne suis pas loin d'être normale, que j'ai foutu la merde pour rien. J'ai honte et je m'en veux.
C'est l'impression qui perdure aujourd'hui. Un somnifère plus tard je ne trippe plus. J'ai de la fièvre et je m'en veux, je regrette. Je voudrais pouvoir saisir l'aspect bénéfique de cette expérience, retenir les belles sensations et laisser aller l'horreur. Je me suis rappelée que je me sens coupable d'exister et indigne de tout, que je m'accroche à la vie comme une mauvaise herbe. Rien de nouveau, ce n'est qu'une piqûre de rappel. A force d'être heureuse j'avais oublié que je ne le méritais pas.
Moi qui croyais que je pouvais devenir meilleure...
Je suis désolée, c'est un peu noir et pessimiste comme vision. Suite à ce trip j'ai décidé de ne plus jamais prendre de lsd, peut-être même de drogue tout court (je ne prends plus de md, coke, speed, etc., je ne fume pas mais j'ai bien aimé quelques trips aux champignons). Une partie de moi en est triste cependant... c'était incroyable d'être la virgule de l'univers.
Mais surtout... je suis perdue... qu'est-ce que je peux tirer de ce putain de trip qui me laisse aux prises avec des informations absolument contradictoires?