Kyran
Elfe Mécanique
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Maman, c'est quoi la réalité ?
Petit topo :
Nous sommes vendredi. Ce soir, on va en Belgique, au Tribes Gathering 2013. Et ensuite, en Hollande pour les coffee.
Avec C et R. J'ai réservé et imprimé les places. Et dis à mes parents que je vais camper avec des amis, sans dire où.
Départ vers 16h. On prends ma voiture.
Fumage de joints sur la route jusqu'à ce qu'il n'y ai plus rien.
On passe la frontière, on arrive à Hotton. Y'a des petits panneaux TG, je dis aux autres "faut suivre les panneaux TA GUEULE !"
ARRIVEE
On se gare pas loin des barrières, et on marche. Y'a plein de gens, et une file interminable de voitures. Je marche, heureux, insouciant.
Je veux faire la fête ! La grosse TEUF de malade ! J'ai envie d'essayer un truc nouveau ce soir.
Après avoir marché peut-être une demi-heure de la voiture jusqu'au bout, en suivant les gyrophares d'une ambulance, on s'arrête. Je demande où c'est, on me dis 300m derrière.
Ensuite, c'est la traversée de la gadoue. Y'a pas un coin ou le pied ne s'enfonce pas en faisant un splorch. J'ai de grosses godasses, ça fait plaisir de patauger en sachant que j'aurais pas les pieds trempés. D'ailleurs jme fout de la gueule de C et R, qui eux ce sont dis qu'ils voulaient avoir la classe. Bah c'est foutu !
On arrive jusqu'à un endroit avec des sortes de grillages, l'entrée du chapiteau. La musique résonne au loin. Faut faire la queue, je file les tickets aux autres.
Au bout, la dame me dis que c'est pas le bon jour... hum. Pas glop. On va voir un peu partout, à la billetterie à côté, pas moyen. Ça commence bien !
R et C veulent essayer de choper de la beuh quand même. Je vais voir un peu les gens, ils me disent plus du côté des voitures ou vers les tentes. Les deux autres me disent "bah ouais génial ton festival".
Bref, moi je reste heureux comme un papillon, on repars, vers les tentes je jette des regards. Je finis par repérer un groupe de gens qui semblent joyeux. J'y vais donc direct, sans oublier de dire bonjour, "vous auriez pas la beuh ?".
Bah si qu'ils me disent. 25€ le sachet, j'achète. Jvais voir les potes, ils veulent acheter aussi. J'en profite pour demander s'ils ont pas d'autres trucs.
"Du speed, dla coke, dla md et de la picole !"
A ce moment-là, il y a eu je pense une erreur de compréhension. La théorie qui se tiens le plus, c'est la confusion entre "de la MD" et "de l'AMT". Mais ça, je le savais pas encore.
Donc minute réflexion. J'ai encore jamais testé la MDMA. Mon expérience se limite aux champis et à l'Ayahuasca à peu près (bon y'a aussi LSA et d'autres trucs mais voilà j'ai pas une grosse expérience).
Bon aller, ici on s'amuse, alors jdemande. 15€ la pilule. Ok.
Je la prends, regarde à travers. Y'a des petits cristaux jaunes-orangés à l'intérieur. C'est beau, d'un côté. Je dis à C et R que j'avale. J'ai appris plus tard qu'ils ont pas capté que j'ai pris un truc à ce moment-là. Ils l'ont vu après.
Bref, on retraverse la boue. Je tombe à un moment, mais j'arrive à me rattraper un peu quand même.
On arrive sur le plat. Des gens nous demandent ou est le chapiteau. Je regarde, mais j'arrive plus à le situer. Sans y prêter plus d'attention, on suis la route pour retourner à la voiture.
Je crois avoir parlé à d'autres personnes sur la route, sans certitude.
Au bout d'un moment, on aperçois les réverbères. Je sens mes pas devenir légers. Tout semble trembloter légèrement. Ca commence.
VENDREDI
Qui qu'est quoi ? Que qui ? Quoi ? Tout deviens flou, et moi je me transforme en un mélange de reptile et de moi. Rapidement, les sons deviennent comme des parasites sur une radio. J'ai l'impression d'avoir la tête sous l'eau, d'entendre ma voix résonner dans ma tête. D'ailleurs, c'est ma voix ? J'ai du mal à la reconnaître.
Je suis encore moi. Mais j'ai fusionné avec une sorte de serpent. Certains instincts que j'avais quelquefois tenté d'enfouir ressortent en force. Je veux... JE VEUX UNE FEMME !
Mais c'est pas urgent. Je me met à marcher bizarrement, en escalier ou en ondulant. J'ondule beaucoup, j'accentue les S et ma mâchoire claque régulièrement. J'ai chaud.
C et R rient beaucoup. Moi je souris, le sourire d'un prédateur à l'affût. Le sourire amical d'un serpent prêt à vous dévorer dès que vous aurez le dos tourné.
Je dis des phrases, qui ont un sens pour l'humain à l'intérieur de moi.
"J'ai jamais connu sssssa... Sssssss'est trop puisssssssant."
Pour donner une idée, c'est comme si un corps totalement écrasé se remettait en place. Y'a des craquements et des déformations dans tous les sens. Ça s'étire, ça se contracte. Je bougeais comme ça. Tout se résumais à des contractions et décontractions.
On arrive à la voiture. Je demande où on est, et ces cons me disent n'importe quoi, parce que ça les fait rire, parce qu'ils savent que je ne suis pas capable de savoir quelle est ma voiture. Ni qui ils sont.
Mais bon, ça n'a pas d'importance. J'ai l'impression d'être dans un de ces films en plein Paris nocturne. On entre dans la voiture.
C'est plus pareil.
La voiture roule. Enfin, je crois. Je vire un peu des trucs derrière. Devant ils veulent qu'on roule, et me demandent le sachet de beuh.
Je cherche, mais je le trouve pas. Alors je me met à fouiller mes poches, les vider, fouiller la voiture entièrement, avec une énergie débordante.
Je fous tout en l'air, on me dis de me calmer. J'essaye, sans réussir. Je regarde autour de moi, j'ai fait des piles d'objets et vêtements sur les côtés, avec moi en T-shirt au milieu. Le roi de l'arrière.
Sous moi, il y a des billets. C'est mon argent. Je le prends et le donne à ceux de devant, parce que je sais que c'est censé avoir de l'importance. En tout cas pour eux.
Je vois des teufeurs qui débarquent à côté de la voiture, ils sont sympas et marrants. J'entends dire que je suis bien attaqué. Ils me voient en train de tout retourner et me demande ce que je cherche.
"Je cherche... mon ssssssachet... de beuh." On me répond : "ton sèche-cheveux ? Ça dois pas être évident à trouver sur une aire d'autoroute !"
Je comprends donc qu'on est sur une aire d'autoroute. Les gens partent. Je demande de monter le son, de mettre à fond plusieurs.
Sauf que le son est à fond depuis un moment, mais j'ai l'impression qu'il est trop faible encore. Sur la route du festival, y'avais du son, je me dis que j'aurais dû rester là-bas.
Je regarde le visage de C, on dirais un indien, je vois des peintures sur son visage.
Après un temps indéfini, j'arrive à me "calmer" un peu. Je me met dans mon sac de couchage, tranquille, et je m'allonge sur les tapis, la tête collée à l'enceinte.
Je sais que je vais souvent pisser, et que je galère à comprendre comment faut faire. Dès que je veux sortir d'ailleurs, je tire comme un fou sur la ceinture, comme un animal en cage.
Je ne sais plus à quel moment, je me rends compte que j'ai des visuels façon champignon, mais beaucoup plus précis et colorés.
J'observe un peu tout.
Il y a des triangles sur le tissu des sièges à l'arrière. Je n'arrive pas à savoir si il y en a vraiment ou pas. Je bloque un peu dessus.
Une piste apparaît. Ça fait penser à un jeu vidéo façon Mario Kart, avec les bandes blanches et rouges dans les virages. Y'a des petites voitures, c'est assez drôle. Je dis aux autres ce que je vois, R me prends pour un fou en demandant si je vois pas des éléphants non plus et C rigole.
Je me demande s'il savent faire autre chose que rire. On me passe un joint. La sensation de fumer est divine. Je suis en extase devant les filaments blancs qui sortent de ma bouche et du pet.
Je sens immédiatement l'effet, ça me permet de canaliser un peu la puissance de tout ça. J'ai l'impression de redescendre légèrement aussi, ça fait du bien.
A un moment, je fixe ma paume. Je vois à travers ma peau, je vois les veines, et le muscle. Rapidement, ça se transforme. Comme si j'avais un monde à part dans ma main.
Je vois un paysage avec la lune, et une sorte de renard en kimono. On dirais un hologramme, qui sors de ma main.
J'approche mon doigt. Il le vois, et me tends la main. On se serre la main/doigt. C'est amical, je suis heureux.
C'est impossible de rester sur un truc. Je passe de l'enceinte à dehors à devant pour voir à derrière allongé.
Je me rappelle avoir regardé ma main et avoir vu plein de mousse baveuse dessus, toute blanche. Puis j'ai voulu y toucher, savoir ce que c'était, et j'ai cru en avoir sur les mains, avant de me rendre compte qu'il n'y avais rien.
Y'a eu un passage ou mon cœur battait à cent à l'heure et je trouvais mon pouls. J'ai demandé aux autres, ils l'ont pas trouvé non plus. Je me suis dis qu'en fait on étais peut-être tous déjà morts, dans une illusion de vie.
Le reste est flou, confus. J'ai pas pu dormir.
SAMEDI
J'ai quelques souvenirs de moi allongé dans la voiture. Je vois qu'on roule, je me lève, et on a pas bougé. Devant ça dors.
Un peu plus tard...
On est allés chercher à bouffer, mais j'ai pas vraiment, et je peux pas manger. Le bruxisme d'hier a fait que je me mordais les joues pour pas trop serrer les dents (parce que mes dents sont pas en bon état déjà).
Bref, j'ai mal dans toute ma bouche, et j'ai mal à la gorge aussi, je sais pas pourquoi. J'ai peut-être crié à certains moments, je m'en souviens pas.
J'ai de la musique dans la tête. White Rabbit, de Jefferson Airplaines. En particulier "And if you go chasing rabbits - And you know you're going to fall". Surtout le "going to fall".
Je me suis dis que j'allais me perdre dans la folie. Que c'était sûr, ça arriverais un jour.
On a pas fait grand-chose le matin je crois. Surement de la route, un peu.
L'aprem on est arrivé à Rotterdam. On a rencontré un type sympa, Momo. Ils a servi de guide. J'ai pas mal parlé avec lui. J'ai eu beaucoup envie de parler.
Y'a eu ce qui m'a semblé être une descente à un moment. Enfin on peux pas exactement parler de descente : je perdais l'énergie de la veille pour gagner en intensité physique et mentale, en résumé en bodyload et en confusion/réflexion.
A certains instants, j'étais incapable de faire autre chose que respirer par grandes bouffées.
C'était tellement intense qu'à certains instants je n'étais plus capable de parler ou de faire quoi que ce soit. R et C m'ont traîné tout le long, totalement défoncés à la weed, en me disant pas plus que "fait ci, fait ça".
Je commençais déjà à regretter leur présence.
D'ailleurs, selon eux Rotterdam c'était pas assez bien. Après avoir acheté pour 100€ de beuh, on repars.
Direction Amsterdam. Sur la route, je bloque à un moment sur le plafond de la voiture. Il se met à fondre, et je vois des gouttes de plafond qui tombent par terre. Hallucination.
Bref, une fois là-bas, je dis qu'il faut chercher un endroit ou se poser et dormir en premier. On me dis OK.
J'aurais été seul, je serais resté dans un hôtel jusqu'à ce que les effets se tassent un peu. Mais j'étais pas seul.
D'abord on va manger. Y'a un restaurant Italien. Je commande le plus petit truc possible, ayant encore du mal à manger. Quand je regarde la table, je vois mon verre fondre et se mélanger au bois. Et puis je cligne des yeux et tout redeviens normal.
Après, go trouver un hôtel.
Je galère, faire dix pas me semble des kilomètres. Mais je tiens et on nous indique un endroit. L'hôtel Stay Okay (en plus le nom il veux tout dire quoi !)
Bref on cherche un peu, je finis par comprendre ou il est et je le dis aux deux autres. Il me disent que finalement non on va trouver un coffee et dormir encore dans la voiture. Moi j'ai plus de thunes, j'essaye de les convaincre mais j'ai pas trop mon mot à dire vu que je suis à sec.
On trouve le Yellow Mellow. J'ai pas ma carte d'identité, elle est dans la voiture. R et C me demandent d'aller la chercher, mais je sais pas où est la voiture, je connais pas le chemin.
J'ai envie de leur dire de laisser tomber, je vais me poser dans la voiture. Finalement je ne dis rien, et on retourne à la voiture puis au coffee.
A l'intérieur, on achète à fumer, on roule. Je parle avec des gens à la même table que nous, en anglais. Je retrouve un peu de l'état d'hier, et je redeviens joyeux. Ca fait plaisir de parler aussi naturellement avec des gens que je ne connais pas.
On finis la soirée défoncés, et on décide de rentrer finalement. Retour maison.
DIMANCHE
C conduit. Je ne sais pas si je dors ou pas, j'ai juste l'impression de partir loin mentalement puis de revenir en ayant oublié où j'étais.
La route est longue.
C finis par être trop fatigué pour conduire. On s'arrête, et les deux devant échangent de place, à cause du volant qui gêne pour allonger ses pieds côté conducteur.
La nuit est longue aussi.
A un moment, je commence à me sentir mal. Je vois une chambre, avec SEUL écrit en lettres de sang partout et moi pendu au milieu.
J'ai besoin de gentillesse. Mais ici, personne n'a le moindre mot aimable pour moi.
Quand R et C se réveillent, je vais mal. Je fait semblant de rien. On va acheter à manger aux magasins sur l'aire de repos. J'arrive à manger un petit peu, l'équivalent d'une bouchée de pain.
On va pour repartir.
La voiture démarre pas, rien ne s'allume. Je suis encore derrière, totalement pas apte à suivre quoi que ce soit mentalement, et au bout d'un moment je demande pourquoi on est pas encore partis.
Bref, je laisse les autres se débrouiller.
Un vieil homme assez gentil reste un moment avec nous, mais impossible de repartir avec les câbles.
Il nous tracte avec sa voiture jusqu'à une aire d'autoroute, mais toujours impossible de démarrer. Ça commence à être inquiétant.
Sur l'aire, il y a un restaurant-motel, Valks. C rigole et dis "Walk ! C'est un signe !"
Ça m'amuse pas du tout. On va là-bas, histoire de se reposer un peu.
Réservation pour la nuit, jusqu'au lendemain 11h déjeuner compris. La chambre est belle, sympa, y'a trois lits, la télé, une baignoire, et de la moquette par terre.
Pour moi, ça a trop un air de Las Vegas Parano.
En parlant de trop, dans ma tête c'est trop.
Il n'y a rien de lisse et plat dans ce monde, et il n'y a rien qui n'est composé que d'un seul bloc. Chaque chose est composée de milliers d'éléments. Toujours en mouvement. Il y a quelque chose de primitif là-dedans.
Mais ça me fatigue. Même quand je ferme les yeux, je vois encore trop de choses. Ca passe d'un aspirateur à une plaquette de chocolat à un bâtiment à l'architecture extrêmement complexe, à des sortes de galeries souterraines...
Dehors, le soleil est un visage à un œil.
Une fois que R a fini sa douche, je vais dans la salle de bains.
L'eau chaude me fait du bien. Les deux autres sortent un moment. Alors je ferme l'évacuation, je veux m'immerger entièrement.
Je ferme les yeux. Quand je les rouvre, je vois que l'eau est rouge. Je saigne du nez, mais pas beaucoup.
Je veux encore plus de chaleur.
Puis je me met à vomir. Principalement du liquide, vu le peu que j'avais mangé. Ça me décide à sortir de la baignoire.
N'ayant pas pris de vêtements de rechange, je suis obligé de mettre les autres qui sont un peu sales. Tant pis. Je reste pieds nus avec une grosse veste.
J'appelle M, un très bon ami et frère de C. J'ai envie de lui parler, qu'il me rassure un peu. Mais C arrive, donc je laisse tomber, je lui passe le téléphone.
Le soir, R et C mettent la télé. Je sais pas pour vous, mais être encore à fond sous prods en galère et entendre la télévision en Hollandais c'est un supplice pour moi.
Ce que j'entendais ressemblait pour moi à du gros charabia genre "davarktu stragada tomolimo krasnaduc". Vous voyez le genre. Avec R et C qui rigolaient.
Là, je les ai vu différemment. Comme des macaques, bouffant avec des miettes partout sur leur visage et leurs fringues en train de rire en permanence.
Je me suis demandé si ma tête allait pas exploser à un moment ou à un autre, par trop d'intensité, trop d'informations.
Dans la soirée je sors avec les deux, fumer un peu sur un joint. L'air frais, c'est bon.
LUNDI
Je ne me souviens plus trop de comment je me suis réveillé.
On a glandé, on est allés déjeuner. On a tenté d'appeler l'assurance pour la voiture.
Essayé de regarder si c'était pas possible de trouver quoi que ce soit pour la redémarrer.
Au final, R et C parlent de la laisser là. Mais non, pour moi c'est pas possible.
J'entends R "de toute façon elle vaux pas trois centimes ta caisse !".
C dis que y'a pas le choix.
Moi, je vais mal, dans tous les sens du terme. Ils me disent qu'au pire ils me laissent là et que plus tard ils retrouverons un squelette parce que j'aurais pas voulu abandonner ma voiture.
Dernier passage à la chambre d'hôtel. Il reste une demi-heure avant de rendre les clés.
Je demande à C de me laisser posé quelques minutes, parce... j'en peux plus. J'ai des sanglots dans la voix en prononçant cette phrase.
Je m'allonge sur le lit et me met à pleurer.
Quelques secondes plus tard, j'entends R qui me tire violemment, limite me frappe, en gueulant "HEY REVEILLE-TOI !".
J'ai beau lui hurler de me laisser tranquille, il arrêteras pas avant que je ne tourne des yeux haineux dans sa direction.
On embarque toutes les affaires.
Un taxi nous emmène à Bréda, une ville à la frontière. Là-bas, on prends le train.
Le retour en France a été long lui aussi. M, le frère de C, est venu nous chercher gare de Lyon.
Je suis resté de mon côté tout le reste du trajet. Quand on me demandais si ça allait, j'ai pas répondu une seule fois oui. Parce qu'honnêtement, ça n'allait pas.
La nuit même, M et C insistent pour que je dorme chez eux. Dans la soirée, j'entends C raconter un peu le voyage.
Sa vision à lui est très tranchée. Il parle de "la loque" pour me désigner.
J'écoute pas, parce que ça me donne envie de le tuer.
Il crois comprendre.
Moi j'ai compris. J'ai compris à quel point je ne sais rien. Et à quel point ceux qui croient savoir sont en réalité les plus ignorants.
M essaye de parler un peu avec moi, mais C se ramène à chaque fois.
MARDI et APRES
Le lendemain, M devais me poser chez moi, mais c'est sa mère qui s'en charge au final.
Dans la voiture, je sens toute la vitesse, comme si j'étais écrasé dans le siège.
Je remarque que je me sens mieux sans mes lunettes. Je discute un peu, mais je suis ailleurs.
En rentrant chez moi, je vois mes parents.
Je leur dis que ma voiture est restée en Hollande. Je fait un peu l'impasse sur ce passage-là, mais ça a été difficile.
Pour l'instant ça s'est calmé un peu, j'essaye de trouver une solution pour récupérer la voiture.
Mercredi soir, j'en pouvais plus. Je pleurais quasi en continu, parce que je lisais une phrase sans rapport dans un livre, parce que j'essayais de m'endormir, pour rien aussi.
A ce propos, j'aimerais remercier en particulier Grivois. Il a été là pour parler avec moi ce soir-là, ça m'a vraiment aidé.
J'en avais trop qui étais trop contenu depuis trop longtemps.
_____________
Il est presque une heure du matin, ce qui fait qu'on est maintenant vendredi. Une semaine après, presque. J'ai encore des effets résiduels, beaucoup dans le noir. Tous les matins depuis, pendant au moins trois quarts d'heure j'ai des violentes remontées.
Je me suis remis en question sur ma vie. J'ai perdu ma timidité. Je m'affirme, que ça plaise ou non. Je dis ce que je pense tout le temps, ce que je faisait pas avant.
J'ai envie de vivre, de voyager, et surtout d'aimer.
Ça a été difficile, et ça l'est encore.
Je me demande toujours ce qu'il y avais vraiment dans cette petite pilule, et surtout quelle dose...
Cette expérience m'a donné envie de dire à tout le monde de vraiment faire attention. C'est con hein, la confusion entre "de la MD" et "de l'AMT". Pour ma part, j'ai vraiment eu PEUR.
J'ai jamais eu aussi peur dans ma vie. Ça a vraiment été un choc. J'ai plus envie de toucher à quoi que ce soit avant très longtemps.
Même les joints.
Ce qui m'a le plus terrorisé ce n'était pas l'idée de mourir. Mais surtout l'idée d'être seul, totalement seul.
Merci de m'avoir lu.
Et merci d'être là.
EDIT : après avoir pu tester de la MDMA de très bonne qualité, quasiment pure, j'ai retrouvé beaucoup de similitudes avec ce qui est écrit plus haut, mais c'était malgré tout assez différent. Donc je pense qu'il est fort possible que la gélule en question étais une gélule de MD, mais probablement coupée à quelques autres trucs pas forcément sympathiques. Bien entendu, il est possible que je me trompe aussi.