Milgram
Elfe Mécanique
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Voici le trip report du mardi 13 juin 2017.
Personnes en présence: G, ma petite amie, et N, un ami de passage.
Dosage: Environs 11 à 12g divisés en trois, soit approximativement 3,5g pour G et moi et 4g pour N.
Mixés puis consommés dans un yahourt de soja nature.
Heure de la prise: Vers 15h40, les doses sont avalées à 16h.
Lieu: Appartement, puis rues adjacentes et centre-ville. Banlieue parisienne proche nord-ouest.
Ambiance musicale: Playlist maison "Shroom party"
L'ingestion, est comme à chaque fois, une épreuve. La nausée m'assaille à chaque cuillerée de yahourt chargé de champignon secs mixés. Comme à chaque fois, j'ai l'angoisse de m'infliger ce goût atroce pour ne rien ressentir au final. Je doutais de la potence des champignon du fait de leur stockage prolongé, malgré les précaution d'usage (tupperware bien fermé, stockage à l'abris de la lumière + billes de silicate.
Je ressens les premiers effets vers 16h20. L'effet que j'appelle le "woom", cette sensation de gravité augmentée une fraction de seconde, avec une sorte de dézoom sur l'environnement, très bref.
Mes camarades ressentent également les premiers effets. L'ascension se fait assez fulgurante. Je pensais me mettre dans un trip plus "merveilleux", ce que j'appelle les "trip régressifs" où je me sens comme un enfant qui s'émerveille de tout, finalement j'ai pas cherché après les visuels, présents mais j'étais pas dans le mood contemplatif. C'est plutôt ce que je cherche à atteindre lors de mes trips. C'est la première fois que je fais un trip concerté avec plus de deux personnes, j'imagine aisément que ça a considérablement orienté mon trip, comme une attache à la réalité doublé d'une complicité de l'instant.
Rapidement, les effets corporels s'installent. J'ai la chance de ne pas subir de nausées désagréable, jamais. Je suppose que je paie déjà mon tribut à l'ingestion, rendant la nausée négligeable. Je ressens le trip dans les cuisses, comme une tension, et l'environnement commence à "respirer". C'est le moment où je commence à bailler et soupirer d'aise.
C'est là, c'est bien là. Je suis rassuré sur la potence des champignons et je me détend afin de profiter de la montée.
Je ressens l'euphorie habituel, la pression qui baisse. je commence à envisager sereinement la suite du voyage. J'observe mes camarades, on a tout les trois les yeux mydriasés, larmoyants.
J'essaye de rester cohérent, je me force à adopter un ton sérieux sur les observations des effets, mais une boule d'émotion monte rapidement dans mon ventre. J'exhale quelque chose entre râle et soupir d'aise. La moindre phrase prononcée par chacun d'entre nous se finir en fou rire. Il ne doit pas être plus de 16h30. La notion du temps se dilue, toute les estimation temporelles sont à titre indicatif.
C'est à ce moment que je bascule vraiment dans ce que les champis ont décidé pour moi: je m'attendais, souhaitais un trip merveilleux et introspectif, mais les conditions l'ont clairement orienté vers un mode social que je n'avais pas encore expérimenté. J'avais un besoin irrépressible de faire des blagues, toutes les réflexions qui me passaient par la tête me semblait drôle et pertinente. J'ai du mal à me rappeler les déclencheurs de ces réflexion, mais il me semble que le lapin y a beaucoup contribué. De mon point de vue, le lapn était juste... rigolo. Rond, poilu et rigolo, avec son intense regard de lapin rigolo. Je crois que ça n'allait pas plus loin que ça.
Et puis arrive l'anecdote du didgeridoo, déclenchée par ce qui semblait être un réflexion partagée sur la qualité de la musique du moment, qui accompagnait parfaitement l'ambiance. J'ai raconté la légende du dieu aborigène, qui, tombé dans un trou, souffla dans son pénis pour appeler à l'aide. C'est nul mais cette légende m'a toujours amusé. C'était le moment idéal pour la ressortir.
A partir de là, je crois que ça a commencé à s'emballer dans ma tête. Mes vannes fusaient, faisaient rire mes camarades; j'entrais dans un cercle vertueux où mon esprit se nourrissait des rires, m'encourageant à continuer à vanner. Je me suis découvert un "talent" comique, que j'ai parfaitement assumé. Un aspect de ma personnalité que je ne sort jamais, que j'ignorais même. j'ai bien eu des comportement similaire avec l'alcool, mais rétrospectivement, je me suis toujours trouvé beauf et indigne, comme une surcouche factice d'amuseur, là où les psilos m'ont donné l'impression de gratter la couche de retenue, révélant une facette de moi non assumée le reste du temps.
Après coup, c'était sans doute simplement la manifestation d'un lâchage de pression accumulée depuis plusieurs mois. Sans doute un besoin de "communier", de partager à travers une émotion simple et bienfaisante comme le rire. J'insiste sur ce point car, étant coutumier des crises de fou rire lors des précédents trip, c'était ponctuel et inhérent aux champis, jamais ça n'était devenu la "couleur dominante" du voyage. A présent je ressens vraiment cette phase comme un exutoire nécessaire, même si ça m'a mécaniquement éloigné de la contemplation et des visions. Je n'en ressens aucune frustration, comme si c'était un choix nécessaire, comme si j'avais simplement choisi la voie que les champignons avaient choisi pour moi.
L'heure tourne... mais je m'en fiche. Comme d'habitude, le temps est une donnée malléable, peu fiable, voire carrément sans importance.
J'ai du mal à tenir en place. Les jours précédent, j'avais anticipé cette envie de sortir découvrir le vaste monde qui me prend à chaque trip, mais que je n'avais jamais réalisé dans ces conditions. Cette fois, j'avais des compagnons, et l'envie de sortir s'en est trouvée décuplée. Heureusement, Nihil me rappelait régulièrement à l'ordre, préférant laisser passer la feu d'artifice d'hilarité. Je prenais mon mal en patience. Je constate avec surprise que je n'ai pas une once d'anxiété à l'idée de sortir, là où, même sobre, je n'ai aucune appétence particulière pour les promenades,surtout en ville.
Nous avions prévu d'aller juste au bout de la rue dans un petit square, litéralement à 200m de l'appartement. Un square toujours désert. Mais ce jour là...
Horreur. On aurait dit qu'on passait au milieu d'un tournage de film, ou d'une énorme caméra cachée focalisée sur nous trois. Il devait y avoir une sortie scolaire le jour même parce qu'on a vu des hordes de gamin en t-shirt bleus "Ecole Simone Veil", il en sortait de partout, nous on essayait de rester focus, et ça nous glissait dessus mais on avait vraiment le sentiment que c'était FAIT EXPRES pour nous.
Nous abandonnons l'idée de se poser près d'un arbre. Trop de gens, trop de regards, je n'étais pas angoissé du tout mais clairement contrarié de ce changement de plan.
Il a eu, en remontant vers la maison, quelques belles images, notamment celle d'un jardin privé magnifique, foisonnant, ombragé. Avec une pointe de frustration dans le ton, je dis que c'est exactement ce dont j'aurai eu envie sur le moment. Je ne m'attarde pas sur ce sentiment, et décide d'aller de l'avant.
Nous décidons (vraiment?) de tenter notre chance plus loin, vers le square jouxtant la mairie.
Je connais bien la route, ce sont des trajets habituels, donc je n'ai à aucun moment l'angoisse de me perdre ou je ne sais quoi. Malheureusement, je suis rendu compte après coup que c'est aussi le moment où la contrariété ressentie (plus proche d'un caprice d'enfant que d'une réelle déception) a cassé la cohérence de mon trip. Pour moi, me poser dans un petit parc, en pleine lumière semblait être un but en soit, je n'avais à aucun moment prévu que ça pouvait se dérouler autrement. Ca m'a brièvement amené à ce que les psilo m'avait déjà fait entrevoir: ma difficulté à lâcher prise, à apprécier l'imprévu, un problème de "contrôle", ni plus ni moins, générateur de frustration si tout ne se passe pas un minimum comme je le voulais.
La route vers la mairie me semble longue, tout en ayant l'impression de voir défiler la rue autour de moi à une vitesse anormale. Comme si je marchais à ma vitesse habituelle, mais que les trottoir étaient des tapis roulants.
Ca devient difficile. Je suis dans le contrôle, je sais que N et G me suivent et je me dis qu'ils comptent sur moi pour la suite des événements. Je guide.
Je m'attendais à ce que les champignon adoucissent l'extérieur, mais le volume sonore urbain, particulièrement au moment de travers une route très fréquentée (en plein heure de pointe, qui plus est), les moteurs, les klaxons... sont autant de micro-agressions. Pour autant, je parviens sans difficulté notable à les laisser glisser sur moi.
Nous arrivons au parc. La densité de gosse est telle que N évoque une fourmilière. Nous nous posons sur un banc. La vue est absolument pathétique. Un sac à dos abandonné à ma gauche, une poussette sans surveillance à ma droite... Je n'aime pas ça. Je dis à haute voix que je ne le sens pas, que je ne sais pas ce qui va exploser le premier. C'est une blague, je n'ai pas de parano latente, mais n'empêche, ça ne me plaît pas. Il n'y a aucune beauté à laquelle me raccrocher.
Trente secondes plus tard, nous décidons d'un "rapatriement d'urgence". Le retour prend presque la forme d'une aventure épique. Du moins, pour mes compagnons. Etant toujours dans le contrôle, j'ai la "responsabilité" de les conduire à bon port, alors je trace. Pour autant, je ne suis pas inquiet de l'état des camarade; ils semblent bien, suivent le mouvement, je sais que nous sommes proches de la maison et que je n'ai pas à m'inquiéter. Sur la route, nous partageons encore tout les trois cette impression que tout le monde s'est donné rendez-vous pour nous. Pile ce jour là. A cette heure là. Une succession de sketch de rue, notamment les quelques lycéens faisant le mur pour, semble t-il, refaire le portrait d'un copain. Aucune idée. Juste un truc rigolo.
La route semble s'étirer sous nos pas, une sensation que je trouve assez normale étant donnée la succession de lignes droites sur ligne droite... c'est presque monotone, comme passer à travers le train fantôme, mais sans le fun. Juste un train fantôme pourri, sans virage, sans relief.
Une fois à la maison, à la fois le silence était agréable, mais la lumière paraissait bien morne, un peu sale... la cohérence de mon trip était rompue, j'étais tellement dans l'optique de poser un cul à côté d'un arbre que forcément, c'était contrariant. On a comaté silencieusement avec de la musique, Garance déclare avoir décroché. Moi-même, je sais que le coup de pompe me guette.
Je suis dans ce moment typique où je ne savais pas si j'avais envie de calme ou de stimulation. Ce moment ou le plus gros du trip est derrière, et que je suis dans un entre-deux que je ne sais pas encore gérer ou apprécier pleinement.
Et puis, la faim, que j'ignore sans problème pendant le trip, se rappelle à moi. Pour moi, c'est le signe évident de la descente bien amorcée. J'envisage sérieusement de faire à manger, mais je sais que ça va être laborieux. Je penche sur des pâtes avec du pesto, point barre. Moment d'émerveillement en débouchant l'huile d'olive, avec ce bec verseur télescopique. Absolument amazing. Les pâtes sont prêtes. Il y a en trop, je peine à finir mon assiette.
Nous décidons de mettre un film, Planète Sauvage. Mon état semi-assoupi et encore tripé me le fait grandement apprécier. A aucun moment il ne m'éjecte, à aucun moment je ne m'ennuie. Je me rend compte que le visionnage d'un film comme ça aurait pu être difficile à appréhender au plus fort du trip, et que la descente est le meilleur moment pour ça. Je le saurais pour les prochaines fois.
Il est pas loin de 23h, je pense. Tout le monde a un coup de pompe. Il est temps de raccrocher. Nous installons la couche de Nihil puis filons dans la chambre.
Là, c'était vraiment bien, dans la pénombre de la chambre, à papoter avec G, brise fraîche, silence... c'était apaisant, mais comme d'hab, un mal fou à m'endormir.
Levés vers 9h30, la tête dans la cul et un peu mal à la tête, comme souvent après un gros trip. Difficile de ressentir les effets positifs, l'inertie du trip en quelque sorte, dès le lendemain. Mais le surlendemain, je me suis plus équilibré, j'ai un peu plus d'énergie, mon humeur est stable et bien plus sereine que d'habitude.
Bref, en résumé, j'attendais un trip différent, les psylos ont décrété que je serai en mode social-pouet pouet, j'ai pris comme ça venait, et étrangement avoir été le rigolo de service ça m'a pas déplu. C'est tellement en décalage avec mon moi habituel que ça avait quelque chose de rafraîchissant. Je pense que personne ne m'a jamais vu dans ce rôle, même bourré. Parce que bourré je fais des blagues de merde pas drôles. Là j'avais des fulgurances desprogiennes sur tout et rien, limite je regrette de pas avoir de vidéo. Ca nous a fait secréter un quantité phénoménales de fluides corporelles, hypersalivation, yeux larmoyants, nez qui coule... ça, plus les fou rires qui n'aident en rien... Mon seul regret c'est que la sortie ai un peu cassé mon fil directeur de trip, j'ai pas vraiment réussi à raccrocher les wagons une fois revenus à l'apart, comme si j'avais plus l'énergie pour.
Quoi qu'il en soit, je ne regrette rien de ce trip, je suis plus surpris de la tonalité qu'il a pris, comparativement à mes expériences passée et l'inévitable attente de "quelque chose" en particulier. Ca a été un trip plutôt énergisant, plein de bonne humeur et de positivité, et je me rend compte que les psilocybes apportent généralement ce dont on a besoin, et pas forcément ce qu'on attend.
Personnes en présence: G, ma petite amie, et N, un ami de passage.
Dosage: Environs 11 à 12g divisés en trois, soit approximativement 3,5g pour G et moi et 4g pour N.
Mixés puis consommés dans un yahourt de soja nature.
Heure de la prise: Vers 15h40, les doses sont avalées à 16h.
Lieu: Appartement, puis rues adjacentes et centre-ville. Banlieue parisienne proche nord-ouest.
Ambiance musicale: Playlist maison "Shroom party"
L'ingestion, est comme à chaque fois, une épreuve. La nausée m'assaille à chaque cuillerée de yahourt chargé de champignon secs mixés. Comme à chaque fois, j'ai l'angoisse de m'infliger ce goût atroce pour ne rien ressentir au final. Je doutais de la potence des champignon du fait de leur stockage prolongé, malgré les précaution d'usage (tupperware bien fermé, stockage à l'abris de la lumière + billes de silicate.
Je ressens les premiers effets vers 16h20. L'effet que j'appelle le "woom", cette sensation de gravité augmentée une fraction de seconde, avec une sorte de dézoom sur l'environnement, très bref.
Mes camarades ressentent également les premiers effets. L'ascension se fait assez fulgurante. Je pensais me mettre dans un trip plus "merveilleux", ce que j'appelle les "trip régressifs" où je me sens comme un enfant qui s'émerveille de tout, finalement j'ai pas cherché après les visuels, présents mais j'étais pas dans le mood contemplatif. C'est plutôt ce que je cherche à atteindre lors de mes trips. C'est la première fois que je fais un trip concerté avec plus de deux personnes, j'imagine aisément que ça a considérablement orienté mon trip, comme une attache à la réalité doublé d'une complicité de l'instant.
Rapidement, les effets corporels s'installent. J'ai la chance de ne pas subir de nausées désagréable, jamais. Je suppose que je paie déjà mon tribut à l'ingestion, rendant la nausée négligeable. Je ressens le trip dans les cuisses, comme une tension, et l'environnement commence à "respirer". C'est le moment où je commence à bailler et soupirer d'aise.
C'est là, c'est bien là. Je suis rassuré sur la potence des champignons et je me détend afin de profiter de la montée.
Je ressens l'euphorie habituel, la pression qui baisse. je commence à envisager sereinement la suite du voyage. J'observe mes camarades, on a tout les trois les yeux mydriasés, larmoyants.
J'essaye de rester cohérent, je me force à adopter un ton sérieux sur les observations des effets, mais une boule d'émotion monte rapidement dans mon ventre. J'exhale quelque chose entre râle et soupir d'aise. La moindre phrase prononcée par chacun d'entre nous se finir en fou rire. Il ne doit pas être plus de 16h30. La notion du temps se dilue, toute les estimation temporelles sont à titre indicatif.
C'est à ce moment que je bascule vraiment dans ce que les champis ont décidé pour moi: je m'attendais, souhaitais un trip merveilleux et introspectif, mais les conditions l'ont clairement orienté vers un mode social que je n'avais pas encore expérimenté. J'avais un besoin irrépressible de faire des blagues, toutes les réflexions qui me passaient par la tête me semblait drôle et pertinente. J'ai du mal à me rappeler les déclencheurs de ces réflexion, mais il me semble que le lapin y a beaucoup contribué. De mon point de vue, le lapn était juste... rigolo. Rond, poilu et rigolo, avec son intense regard de lapin rigolo. Je crois que ça n'allait pas plus loin que ça.
Et puis arrive l'anecdote du didgeridoo, déclenchée par ce qui semblait être un réflexion partagée sur la qualité de la musique du moment, qui accompagnait parfaitement l'ambiance. J'ai raconté la légende du dieu aborigène, qui, tombé dans un trou, souffla dans son pénis pour appeler à l'aide. C'est nul mais cette légende m'a toujours amusé. C'était le moment idéal pour la ressortir.
A partir de là, je crois que ça a commencé à s'emballer dans ma tête. Mes vannes fusaient, faisaient rire mes camarades; j'entrais dans un cercle vertueux où mon esprit se nourrissait des rires, m'encourageant à continuer à vanner. Je me suis découvert un "talent" comique, que j'ai parfaitement assumé. Un aspect de ma personnalité que je ne sort jamais, que j'ignorais même. j'ai bien eu des comportement similaire avec l'alcool, mais rétrospectivement, je me suis toujours trouvé beauf et indigne, comme une surcouche factice d'amuseur, là où les psilos m'ont donné l'impression de gratter la couche de retenue, révélant une facette de moi non assumée le reste du temps.
Après coup, c'était sans doute simplement la manifestation d'un lâchage de pression accumulée depuis plusieurs mois. Sans doute un besoin de "communier", de partager à travers une émotion simple et bienfaisante comme le rire. J'insiste sur ce point car, étant coutumier des crises de fou rire lors des précédents trip, c'était ponctuel et inhérent aux champis, jamais ça n'était devenu la "couleur dominante" du voyage. A présent je ressens vraiment cette phase comme un exutoire nécessaire, même si ça m'a mécaniquement éloigné de la contemplation et des visions. Je n'en ressens aucune frustration, comme si c'était un choix nécessaire, comme si j'avais simplement choisi la voie que les champignons avaient choisi pour moi.
L'heure tourne... mais je m'en fiche. Comme d'habitude, le temps est une donnée malléable, peu fiable, voire carrément sans importance.
J'ai du mal à tenir en place. Les jours précédent, j'avais anticipé cette envie de sortir découvrir le vaste monde qui me prend à chaque trip, mais que je n'avais jamais réalisé dans ces conditions. Cette fois, j'avais des compagnons, et l'envie de sortir s'en est trouvée décuplée. Heureusement, Nihil me rappelait régulièrement à l'ordre, préférant laisser passer la feu d'artifice d'hilarité. Je prenais mon mal en patience. Je constate avec surprise que je n'ai pas une once d'anxiété à l'idée de sortir, là où, même sobre, je n'ai aucune appétence particulière pour les promenades,surtout en ville.
Nous avions prévu d'aller juste au bout de la rue dans un petit square, litéralement à 200m de l'appartement. Un square toujours désert. Mais ce jour là...
Horreur. On aurait dit qu'on passait au milieu d'un tournage de film, ou d'une énorme caméra cachée focalisée sur nous trois. Il devait y avoir une sortie scolaire le jour même parce qu'on a vu des hordes de gamin en t-shirt bleus "Ecole Simone Veil", il en sortait de partout, nous on essayait de rester focus, et ça nous glissait dessus mais on avait vraiment le sentiment que c'était FAIT EXPRES pour nous.
Nous abandonnons l'idée de se poser près d'un arbre. Trop de gens, trop de regards, je n'étais pas angoissé du tout mais clairement contrarié de ce changement de plan.
Il a eu, en remontant vers la maison, quelques belles images, notamment celle d'un jardin privé magnifique, foisonnant, ombragé. Avec une pointe de frustration dans le ton, je dis que c'est exactement ce dont j'aurai eu envie sur le moment. Je ne m'attarde pas sur ce sentiment, et décide d'aller de l'avant.
Nous décidons (vraiment?) de tenter notre chance plus loin, vers le square jouxtant la mairie.
Je connais bien la route, ce sont des trajets habituels, donc je n'ai à aucun moment l'angoisse de me perdre ou je ne sais quoi. Malheureusement, je suis rendu compte après coup que c'est aussi le moment où la contrariété ressentie (plus proche d'un caprice d'enfant que d'une réelle déception) a cassé la cohérence de mon trip. Pour moi, me poser dans un petit parc, en pleine lumière semblait être un but en soit, je n'avais à aucun moment prévu que ça pouvait se dérouler autrement. Ca m'a brièvement amené à ce que les psilo m'avait déjà fait entrevoir: ma difficulté à lâcher prise, à apprécier l'imprévu, un problème de "contrôle", ni plus ni moins, générateur de frustration si tout ne se passe pas un minimum comme je le voulais.
La route vers la mairie me semble longue, tout en ayant l'impression de voir défiler la rue autour de moi à une vitesse anormale. Comme si je marchais à ma vitesse habituelle, mais que les trottoir étaient des tapis roulants.
Ca devient difficile. Je suis dans le contrôle, je sais que N et G me suivent et je me dis qu'ils comptent sur moi pour la suite des événements. Je guide.
Je m'attendais à ce que les champignon adoucissent l'extérieur, mais le volume sonore urbain, particulièrement au moment de travers une route très fréquentée (en plein heure de pointe, qui plus est), les moteurs, les klaxons... sont autant de micro-agressions. Pour autant, je parviens sans difficulté notable à les laisser glisser sur moi.
Nous arrivons au parc. La densité de gosse est telle que N évoque une fourmilière. Nous nous posons sur un banc. La vue est absolument pathétique. Un sac à dos abandonné à ma gauche, une poussette sans surveillance à ma droite... Je n'aime pas ça. Je dis à haute voix que je ne le sens pas, que je ne sais pas ce qui va exploser le premier. C'est une blague, je n'ai pas de parano latente, mais n'empêche, ça ne me plaît pas. Il n'y a aucune beauté à laquelle me raccrocher.
Trente secondes plus tard, nous décidons d'un "rapatriement d'urgence". Le retour prend presque la forme d'une aventure épique. Du moins, pour mes compagnons. Etant toujours dans le contrôle, j'ai la "responsabilité" de les conduire à bon port, alors je trace. Pour autant, je ne suis pas inquiet de l'état des camarade; ils semblent bien, suivent le mouvement, je sais que nous sommes proches de la maison et que je n'ai pas à m'inquiéter. Sur la route, nous partageons encore tout les trois cette impression que tout le monde s'est donné rendez-vous pour nous. Pile ce jour là. A cette heure là. Une succession de sketch de rue, notamment les quelques lycéens faisant le mur pour, semble t-il, refaire le portrait d'un copain. Aucune idée. Juste un truc rigolo.
La route semble s'étirer sous nos pas, une sensation que je trouve assez normale étant donnée la succession de lignes droites sur ligne droite... c'est presque monotone, comme passer à travers le train fantôme, mais sans le fun. Juste un train fantôme pourri, sans virage, sans relief.
Une fois à la maison, à la fois le silence était agréable, mais la lumière paraissait bien morne, un peu sale... la cohérence de mon trip était rompue, j'étais tellement dans l'optique de poser un cul à côté d'un arbre que forcément, c'était contrariant. On a comaté silencieusement avec de la musique, Garance déclare avoir décroché. Moi-même, je sais que le coup de pompe me guette.
Je suis dans ce moment typique où je ne savais pas si j'avais envie de calme ou de stimulation. Ce moment ou le plus gros du trip est derrière, et que je suis dans un entre-deux que je ne sais pas encore gérer ou apprécier pleinement.
Et puis, la faim, que j'ignore sans problème pendant le trip, se rappelle à moi. Pour moi, c'est le signe évident de la descente bien amorcée. J'envisage sérieusement de faire à manger, mais je sais que ça va être laborieux. Je penche sur des pâtes avec du pesto, point barre. Moment d'émerveillement en débouchant l'huile d'olive, avec ce bec verseur télescopique. Absolument amazing. Les pâtes sont prêtes. Il y a en trop, je peine à finir mon assiette.
Nous décidons de mettre un film, Planète Sauvage. Mon état semi-assoupi et encore tripé me le fait grandement apprécier. A aucun moment il ne m'éjecte, à aucun moment je ne m'ennuie. Je me rend compte que le visionnage d'un film comme ça aurait pu être difficile à appréhender au plus fort du trip, et que la descente est le meilleur moment pour ça. Je le saurais pour les prochaines fois.
Il est pas loin de 23h, je pense. Tout le monde a un coup de pompe. Il est temps de raccrocher. Nous installons la couche de Nihil puis filons dans la chambre.
Là, c'était vraiment bien, dans la pénombre de la chambre, à papoter avec G, brise fraîche, silence... c'était apaisant, mais comme d'hab, un mal fou à m'endormir.
Levés vers 9h30, la tête dans la cul et un peu mal à la tête, comme souvent après un gros trip. Difficile de ressentir les effets positifs, l'inertie du trip en quelque sorte, dès le lendemain. Mais le surlendemain, je me suis plus équilibré, j'ai un peu plus d'énergie, mon humeur est stable et bien plus sereine que d'habitude.
Bref, en résumé, j'attendais un trip différent, les psylos ont décrété que je serai en mode social-pouet pouet, j'ai pris comme ça venait, et étrangement avoir été le rigolo de service ça m'a pas déplu. C'est tellement en décalage avec mon moi habituel que ça avait quelque chose de rafraîchissant. Je pense que personne ne m'a jamais vu dans ce rôle, même bourré. Parce que bourré je fais des blagues de merde pas drôles. Là j'avais des fulgurances desprogiennes sur tout et rien, limite je regrette de pas avoir de vidéo. Ca nous a fait secréter un quantité phénoménales de fluides corporelles, hypersalivation, yeux larmoyants, nez qui coule... ça, plus les fou rires qui n'aident en rien... Mon seul regret c'est que la sortie ai un peu cassé mon fil directeur de trip, j'ai pas vraiment réussi à raccrocher les wagons une fois revenus à l'apart, comme si j'avais plus l'énergie pour.
Quoi qu'il en soit, je ne regrette rien de ce trip, je suis plus surpris de la tonalité qu'il a pris, comparativement à mes expériences passée et l'inévitable attente de "quelque chose" en particulier. Ca a été un trip plutôt énergisant, plein de bonne humeur et de positivité, et je me rend compte que les psilocybes apportent généralement ce dont on a besoin, et pas forcément ce qu'on attend.