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Truffes - Un Séraphin dans le morvan

cermunos

Neurotransmetteur
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3 Nov 2022
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Bad Trip… une question de point de vue



1.      Matériel et organisation
Je fais 1.8m, 80 kg, j’ai pris 45 g de truffes Hollandia en thé à 80°C avec menthe, sucre, et un poil de citron le tout dans une thermos. Le lieu prévu est isolé à 1h15 à pied de chez moi, c’est la Samain, le jour où on peut rencontrer les esprits. Je suis parti le matin à jeun vers 7h30 et j’ai pris le thé en marchant par petites gorgées 20 mn avant d’arriver. L’endroit est retiré agréable, je le connais bien et j’ai déjà eu des expériences à cet endroit. Un tel portable pour au cas où.
La dose est bien trop élevée je le sais: c’est ma cinquième expérience depuis cet été. J’ai commencé par de très faibles doses 3g. Je me suis permis d’augmenter au-delà de ce qui est recommandé car je me sens très à l’aise et encore trop dans le contrôle à chaque expérience même à 30 g. J’ai pas mal lu sur les bad trip et suis intéressé par la gestion d’un « bad trip ». Pour moi c’est aller rencontrer mes peurs cachées ce qui me fait honte et me dégoute pour faire connaissance avec mon ombre.
Etat émotionnel : je vais très bien.
Enfin, ça son importance, la veille j’ai passé deux jours à faire une soudure compliquée que j’ai recommencée 20 fois.
 
2.      Démarrage
Le démarrage me semble long, je marche en prenant mon thé, pas d’effet. J’arrive au lieu du trip en foret dans un chao granitique et je m’assois dans un arbre en fourche. Je me mets pieds nus pour êtreplus confortable eyt bien ancré. Les images se déforment un peu, des lichens sur les roches se tissent et ressemble aux motifs des peaux de serpent, les images se structurent de plus en plus. Si je fais le vide dans mon esprit je vois des yeux apparaitre dans la nature, des regards de biches à grand cils dans tous les étages de foret, l’impression grandis et le motif devient de plus en plus dense et présent. Cependant tenir l’image est fatigant pour le cerveau et je faibli. L’image perd en intensité, je remarque houx devant moi, il est petit, il est dominé, c’est un arbre qui ne se développera pas qui pique, mais qui fait partie du tableau. Je pense à mes défauts, ce dont j’aimerai me débarrasser. En même temps je prends cette pensée de haut, je plaisante un peu tout en prenant conscience que je suis en train de fuir une pensée difficile.
L’idée passe, j’essaye de reprendre avec le paysage et les visuels assez grandioses mais un écœurement me vient. Mon premier mouvement est de vouloir reprendre le contrôle, de ne pas dégueuler car il y en pour 40 euros de champis… Aussitôt j’ai honte de cette pensée mercantile,  j’ai réellement envie de laisser venir et d’accepter de vive cet écœurement qui se manifeste. Je comprends que je dois vomir les idées. Je décide de laisser faire en restant très présent à ce qui passe : mon nez coule abondamment et je bave un peu, je fais quelques grimaces incontrôlables. Il y a une sorte de dissociation : l’ombre et moi. Heureusement je suis seul et personne de flippera à cause de ce qui va se passer.
L’ombre « Qu’est-ce que tu veux, qu’est-ce que tu vas me faire avec ta petite gueule de bourge »
Moi « Faire ta connaissance te reconnaitre »
L’ombre «  tu veux ma mort, tu veux m’éliminer, je te connais tu veux avoir l’air d’un type bien et tu élimine tout ce qui ne te plait pas»
ça passe, je me dit que j’ai évacué un bon truc négatif, j’essaye de repartir sur un truc positif
Le dégout revient sous forme des 40 Euros, « Si tu veux me connaitre faut pas avoir peur de dégueulé 40 euros, t’es trop con », alors ok je laisse faire mon nez coule et je bave abondamment, je vis ce petit écœurement. Il y a un peu de pluie, j’ai un peu froid, mais ça passe. J’ai l’impression que c’est fini.
3.      Trip
Une troisième vague d’écœurement me reprend, je mouche en longs filets, je bave, et ma bouche se déforme en grimaces hideuses style tableau des enfers de Jérome Bosch, ça dur un peu… je laisse venir, j’ai un vocabulaire grossier qui monte « la chienne », « le fumier ». Je me souviens de l’agonie de mon arrière-grand-mère qui traitait les infirmières charognes. J’ai le sentiment de faire face à ma pulsion de vie la plus primitive « Cette chienne qui veut vivre et fera tout pour vivre ». Mes doigts deviennent des griffes, je laisse faire des mouvements du bassin qui me viennent comme pour un coït animal… bref je me laisse posséder sans honte car seul et sans risque pour personne. Tout ce temps une partie de moi est présente en observation.
L’ombre « Qu’est-ce que tu veux ? tu veux faire quoi de moi ? Si je pars qui s’occupera de moi ? Tu me laisseras pourrir dans une décharge» J’ai le sentiment qu’on est en train de sortir un animal apeuré qui est resté trop longtemps en cage et qui en veux à la terre entière.
Moi « Viens on va faire connaissance on va essayer de te réintégrer au monde»
L’ombre « ok, je viens, mais pas d’histoire, pas d’enjolivement, je veux que du réel »
 Suite à ces mots les images colorées cessent, le tissage visuel s’arrête, la forêt est éclairée d’une lumière intense et froide… Je repense à tous ces salauds que j’ai rencontrés, les critiques que j’ai pu faire, la souffrance que j’ai pu engendrer celle que j’ai subi. Je pense à Poutine et ses semblables. Je les plaints, je nous plaints, je pense à cette chienne acariâtre qui emmerde le monde qui le divise par peur, qui commente, qui meurtri avec des mots mal employés, l’absence de place, l’injustice qui se perpétue. Je comprends plus profondément qu’une solution pourrait être la compassion.  
L’idée qui me porte est de réintégré ce qui est possible, l’arbre devant moi devient rouge, c’est comme si je le forgeai. Il fait froid, j’ai besoin d’énergie, je chauffe cet arbre qui rougie. En fermant les yeux je peux visualiser les espaces qui séparent les morceaux de métal les uns des autres. C’est intime, très fin et difficile à combler. Je chauffe encore en fermant les yeux, il fait de plus en plus froid alors que la température monte, le métal passe au jaune paille, il s’épure, ce qui était prêt s’incorpore à un métal en fusion grande qualité. Les grains de métal qui n’étaient épurés repartent dans le laitier et dans le cycle de vie et reviendront … Ce travaille d’épuration est super intense et me donne une sorte de transe très forte au cours de laquelle je grogne, je me raidi en me contractant violemment. Je vis en détaille l’incorporation de chaque particule dans le bain de fusion. Au cours de cette visualisation je n’ai presque plus de contrôle et je sens une élévation physique très intense, je suis très contracté. A la fin je vois des partie d’un  plan en 3D, je vois mais je ne comprends pas le sens car je n’ai pas de vision d’ensemble.
 
4.      Descente
Je regarde ma montre il est 10h20, j’ai un message de ma sœur et de ma mère qui veulent me voir. J’ai un peu mal à la tête, je redescends doucement en repensant à cette idée de chienne Cette partie de moi sans doute trop dominée et souffrante qui doit être réintégrée et jouer son rôle. Cette chienne doit devenir un beau loup gardien de vie.
 Je repense aussi au choix fait pour ce trip, aller voir la part sombre était peut-être la solution de facilité. Construire le beau, le projeter dans la nature est « magique » et beaucoup plus difficile car tellement facile à qualifier d’illusion. Parfois souffrir en prétendant connaitre une réalité nue et violente est plus facile. J’ai continué à observer la nature, j’ai eu envie de manger quelque chose de simple et bon. Une fois rentré à la maison je me suis mis en cuisine.
 

Sorence

zolpinaute de la sapience
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11 Oct 2022
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Aller voir la part sombre était peut-être la solution de facilité. Construire le beau, le projeter dans la nature est « magique » et beaucoup plus difficile car tellement facile à qualifier d’illusion. Parfois souffrir en prétendant connaitre une réalité nue et violente est plus facile. J’ai continué à observer la nature, j’ai eu envie de manger quelque chose de simple et bon.

Très joli :shy:
 

diaphane

Elfe Mécanique
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5 Août 2022
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Excellent ce trip ! C'est intéressant cette idée fixe de la soudure. Une technique qui sert à recoller les morceaux et en même temps tu veux te détacher d'une part d'ombre. Et puis on ressent aussi cette confusion entre les impuretés du métal et celles dont tu veux débarrasser ton esprit. Soit c'est à creuser, soit je délire.

Quand même je dirais que les €40 ont été bien dépensés.

Merci pour ce partage !
 

cermunos

Neurotransmetteur
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3 Nov 2022
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Une technique qui sert à recoller les morceaux et en même temps tu veux te détacher d'une part d'ombre. Et puis on ressent aussi cette confusion entre les impuretés du métal et celles dont tu veux débarrasser ton esprit. Soit c'est à creuser, soit je délire.

Oui je pense que c'est à creuser. Je me dit que seul une part de l'ombre peut être réintégrée en plusieurs étape, il reste au fond une partie profondément dysfonctionnelle. Je pense que mon expérience de soudure à du fixer un symbolisme dans le registre alchimique / métallurgique.
 

cermunos

Neurotransmetteur
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3 Nov 2022
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cermunos a dit:
Une technique qui sert à recoller les morceaux et en même temps tu veux te détacher d'une part d'ombre. Et puis on ressent aussi cette confusion entre les impuretés du métal et celles dont tu veux débarrasser ton esprit. Soit c'est à creuser, soit je délire.

Oui je pense que c'est à creuser. Je me dit que seul une part de l'ombre peut être réintégrée en plusieurs étape, il reste au fond une partie profondément dysfonctionnelle. Je pense que mon expérience de soudure à du fixer un symbolisme dans le registre alchimique / métallurgique.

En creusant un peu j'ai trouvé une référence intéressante qui fait écho à cette expérience.

 

ICI

Neurotransmetteur
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23 Oct 2022
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cermunos a dit:
Bad Trip… une question de point de vue

effectivement, j'ai l'impression que c'est plutôt une question de point de vue a posteriori que sur l'instant au point que je me demande si les bad trips existent, ça me semble plus être un abus de langage qu'on a collé là pour définir un instant T.


Est-ce que ce n'est pas comme dans la vie où même les expériences difficiles amènent à mieux se connaître et il n'est pas rare d'y trouver une force par la suite si on trouve la bonne mise en perspective. Il est possible de sortir grandi d'une épreuve alors qu'on verbalise moins le fait de sortir grandi d'une expérience positive.
Sur un mode un peu plus trivial, on aura plus à raconter d'un voyage IRL (bien que là aussi la sémantique peine à définir ici et l'autre côté voile, une pièce de monnaie à bien deux face et pourtant c'est une pièce de monnaie) qui se passe "mal", le côté rocambolesque des situations et des solutions trouvées à la va-vite colorera l'expérience globale pour en laisser une trace particulière.
A contrario, être pris par les évènements beaux et facile, de facto sans efforts demande justement un "effort" supplémentaire pour laisser une empreinte aussi intense.
La pièce de monnaie à une face qui subit les évènement et l'autre qui les provoque, doit les faire advenir.

Ce que tu as synthétisé ici de façon remarquable je trouve :
cermunos a dit:
Aller voir la part sombre était peut-être la solution de facilité. Construire le beau, le projeter dans la nature est « magique » et beaucoup plus difficile car tellement facile à qualifier d’illusion. Parfois souffrir en prétendant connaitre une réalité nue et violente est plus facile.

Super TR, bien écrit, très immersif et inspirant.
Merci pour ton expérience.
 

Sorence

zolpinaute de la sapience
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11 Oct 2022
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au point que je me demande si les bad trips existe
Oui ça existe, même s’il faudrait effectivement éviter d’accoler ce terme à chaque ressenti négatif afin de ne pas en atténuer la force.
Il n’y a pas de définition précise mais on le décrit généralement comme quelque-chose de long, puissant, qui entache la majeure partie du trip ; des sentiments qui ne sont pas consentis, qu’on voudrait fuir, mais sans y parvenir ; quelque-chose d’assez traumatisant, dont il est difficile de tirer du positif, même si ça peut venir plus tard.
 

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Neurotransmetteur
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23 Oct 2022
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Sorence a dit:
même s’il faudrait effectivement éviter d’accoler ce terme à chaque ressenti négatif afin de ne pas en atténuer la force.
 je plussoie
 
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