Salut à tous,
Mon dernier post date.. Je reviens faire un tour sur le forum pour vous faire partager un texte que j'ai trouvé très instructif et particulièrement convaincant sur les problèmes que posent les avancées scientifiques en neurosciences et sur leurs conséquences espérées ou redoutées. En gros, Alain Ehrenberg, l'auteur, est un sociologue français qui s'intéresse depuis une vingtaine d'années à l'émergence de l'individualisme dans les sociétés occidentales contemporaines. L'individualisme comme méthode en sciences humaines, et de manière plus générale comme idéologie dont la croyance principale est que le sujet individuel, le soi, le subjectif, serait désormais la clef pour expliquer les comportements individuels et sociaux. Le développement des neurosciences serait un symptôme de cette tendance en tant qu'il tient le cerveau des individus pour la conscience biologique de la personne et réduit la personne à sa base neurobiologique. Selon lui:
" Les raisons sociales du succès populaire des neurosciences tiennent
alors moins à leurs résultats scientifiques et pratiques qu’au
style de réponse apportée aux problèmes posés par notre idéal d’autonomie
individuelle généralisée. Elles permettent aujourd’hui de
consoler ceux qui, en réalité la plupart d’entre nous, ont des difficultés
à faire face à ce monde de décision et d’action qui s’est édifié sur
les ruines de la société de discipline, celle qui connaissait ce respect
de l’autorité dont la perte fait l’objet de lamentations quotidiennes.
Mais les neurosciences suscitent également l’espoir que soit fourni à
chacun des techniques de multiplication des capacités cognitives et
de maîtrise émotionnelle, également indispensables dans un tel style
de vie. C’est pourquoi les neurosciences ne sont pas extérieures à
l’idée de « santé mentale », elles en sont la pointe scientifique et
technologique. Les habitudes prises avec les consommations de
médicaments psychotropes, de drogues et de substances dopantes,
ces pratiques neurochimiques d’usinage de soi, ont largement préparé
le terrain. L’extension des frontières de soi que recouvre la normativité
de l’autonomie (valorisation de la réalisation de soi, de l’action
individuelle, de la self-ownership) fait que les conditions semblent
réunies pour qu’une représentation de soi comme cerveau malade
constitue une référence sémantique appropriée."
Le lien à suivre:
http://cesames.org/spip/IMG/pdf/esprit-11-04-2.pdf
Bonne lecture à ceux que ça intéresse
Mon dernier post date.. Je reviens faire un tour sur le forum pour vous faire partager un texte que j'ai trouvé très instructif et particulièrement convaincant sur les problèmes que posent les avancées scientifiques en neurosciences et sur leurs conséquences espérées ou redoutées. En gros, Alain Ehrenberg, l'auteur, est un sociologue français qui s'intéresse depuis une vingtaine d'années à l'émergence de l'individualisme dans les sociétés occidentales contemporaines. L'individualisme comme méthode en sciences humaines, et de manière plus générale comme idéologie dont la croyance principale est que le sujet individuel, le soi, le subjectif, serait désormais la clef pour expliquer les comportements individuels et sociaux. Le développement des neurosciences serait un symptôme de cette tendance en tant qu'il tient le cerveau des individus pour la conscience biologique de la personne et réduit la personne à sa base neurobiologique. Selon lui:
" Les raisons sociales du succès populaire des neurosciences tiennent
alors moins à leurs résultats scientifiques et pratiques qu’au
style de réponse apportée aux problèmes posés par notre idéal d’autonomie
individuelle généralisée. Elles permettent aujourd’hui de
consoler ceux qui, en réalité la plupart d’entre nous, ont des difficultés
à faire face à ce monde de décision et d’action qui s’est édifié sur
les ruines de la société de discipline, celle qui connaissait ce respect
de l’autorité dont la perte fait l’objet de lamentations quotidiennes.
Mais les neurosciences suscitent également l’espoir que soit fourni à
chacun des techniques de multiplication des capacités cognitives et
de maîtrise émotionnelle, également indispensables dans un tel style
de vie. C’est pourquoi les neurosciences ne sont pas extérieures à
l’idée de « santé mentale », elles en sont la pointe scientifique et
technologique. Les habitudes prises avec les consommations de
médicaments psychotropes, de drogues et de substances dopantes,
ces pratiques neurochimiques d’usinage de soi, ont largement préparé
le terrain. L’extension des frontières de soi que recouvre la normativité
de l’autonomie (valorisation de la réalisation de soi, de l’action
individuelle, de la self-ownership) fait que les conditions semblent
réunies pour qu’une représentation de soi comme cerveau malade
constitue une référence sémantique appropriée."
Le lien à suivre:
http://cesames.org/spip/IMG/pdf/esprit-11-04-2.pdf
Bonne lecture à ceux que ça intéresse