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La chatoyante expérience de la Truffe Atlantis

Lobo.

Neurotransmetteur
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11 Nov 2015
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Salut ! :) Voilà mon premier TR, il est assez long car j'ai donné des détails qui me semblaient importants ou poétiques. Il est aussi illustré par plusieurs photos car cela reste avant tout une expérience visuelle. Par contre, à ma grande déception, ce site ne permet de publier que 5 images par post, au lieu de 17... Je vous invite donc à lire mon trip report via le lien ci-dessous. J'ai abordé certains passages avec une approche poétique, j'espère que vous y serez sensibles. Cependant le texte est à la base destiné à faire découvrir les effets des substances psychédéliques à des personnes qui n'ont pas d'expérience, donc certains passages peuvent paraître assez évident pour des lecteurs de TR aguerris ! Je compte sur vous pour me conseiller sur l'écriture de TR, s'il y a des passages à modifier, etc. Si vous le souhaitez, portez également attention à la manière dont la couleur/lumière est traitée au long du texte, elle représente les différents états d'esprit qu'ont traversés cette formidable expérience que je souhaite vous partager, enjoy !

https://www.psychoactif.org/forum/t16671-p1-chatoyante-experience-Truffe-Atlantis.html#divx


----------- La chatoyante expérience de la Truffe Atlantis ------------​


Vendredi 5 juin 2015. C'est le jour que l'on attendait. Il est 18h45. On se retrouve tous au Parc de la Gloriette de la ville de Tours, impatients. On s'installe premièrement au "carré" le fameux coin d'herbe où l'on a presque tous déjà "truffé". Mais au-dessus de nos têtes, les nuages gris parcourent le ciel et l'orage gronde. « That long black cloud is comin' down » comme dit Bob Dylan, dans Knockin' on Heaven's Doors.

Lien de la version originale :

19h : Alors qu'on avait commencé à installer nos affaires dans l'herbe, la pluie éclate, et pas qu'un peu ! A travers le déluge, on court se réfugier sous un large abri en bois. Mais avec ce temps inattendu, notre enthousiasme à l'idée de prendre des truffes s'estompe... Il faut savoir que celles-ci contiennent, comme les champignons hallucinogènes, de la psilocybine et de la psilocine qui sont des composés psychoactifs. Le nom officiel de la truffe magique est "sclérote". Et elles sont également connues sous le nom de "Pierres Philosophales".


19h30: Après de longues minutes d'hésitation, on se rassemble, et, assis sur nos tentures aux motifs psychédéliques, on signe tous la charte de responsabilité, avant de manger notre portion. Marius et ses 6-7g ; son pote Camille et ses 4g (initiation) ; Jo et ses 15g ; Pierre et ses 8g (initiation); moi, mes 15g. C'est la première fois que j'en prends autant, mes précédents trips furent légers. Maxime, lui, est notre Gardien, c'est un peu notre "Sam": Celui qui surveille, c'est celui qui ne truffe pas ! Il prend son rôle très au sérieux, c'est important, car ça peut rapidement mal tourner. Pendant notre absorption, il joue à la guitare Innocent, de Joe Hisaishi, c'est la musique du Château dans le Ciel, de Miyazaki.


Amener des croissants et de la confiture de fraise, c'était vraiment une bonne idée, car cela fit passer le goût sec et fade (carrément immonde) des truffes. La pluie se calme.


20h : Après l'orage, la lumière apparaît dans le ciel comme dans mon esprit. Une sensation puissante d'enthousiasme m'envahit pendant la montée, progressive. Quelques perles de pluie, illuminées par le soleil, déferlent du ciel et des feuilles des arbres. C'est une réelle sensation d'éveil qui parcourt mon corps ! Une grande force l'emplit, il paraît même que mes muscles étaient bandés, et que j'étais complètement « vivant », selon Marius. « C'est un mélange entre des vagues, et un torrent qui se déchaîne... Comme si je libérais un torrent tu vois, qui sort de moi ! » je tente d'expliquer à Jo. Torse nu, je saute partout, danse, fais des figures acrobatiques en m'accrochant aux poutres de l'abri tel un singe. Je prends conscience des réelles capacités de mon corps, et des limites que l'on s'impose physiquement, c'est dû à la peur je pense. Mais grâce aux truffes je ne ressens plus aucune peur. Cette prise de conscience m'en fait découvrir une autre : il n'y a pas que physiquement que l'on s'impose des limites, mais également mentalement. C'est toujours la montée des effets, qui sont pour le moment encore assez faibles.


20h30 : Au loin, j'aperçois le soleil éclatant. Il m'attire. Je prends ma guitare, que j'accroche autour de moi non sans difficulté, et je pars en direction de celui-ci. Il me semble proche de moi...aussi bien physiquement que spirituellement.
Après lui avoir joué un morceau ou deux, je reviens tout joyeux en grattant sur ma guitare. Marius est grimpé en haut d'un grand tas de sable, il semble particulièrement heureux de me voir surgir.
Maxime est là aussi, et bien qu'il soit sobre, je sens une réelle connexion spirituelle entre nous 3. Je lui décris ce que je ressens, et il me pose quelques questions, pour voir si tout va bien ; je lui explique que je suis encore en montée d'effets mais que je parviens parfaitement à me contrôler. Après avoir déposé ma guitare, j'observe mes partenaires tripper : ils sont marrants ! Tout le monde semble apprécier les effets de ces petits champignons magiques ! L’état d’esprit général que l’on ressent grâce à eux est indescriptible… On se sent psychologiquement très haut par rapport à la réalité, on découvre un monde nouveau.





Voir la pièce jointe 17785
Photo prise par Jo lors d'une autre "truffade"​


Il est environ 21h, et comme c'est bientôt l'été, il fait encore jour. Le soleil me manque déjà, je me sentais si bien face à lui. Je repars me promener seul dans les champs. Sur le chemin, des pierres de quartz blanches brillent telles des étoiles. Je me rappelle que Jo avait eu des hallus sur ce chemin un mois plus tôt.
Pieds nus, je marche légèrement dans l'herbe encore humide, puis je m'assoie face à l'immense cercle de lumière surplombant le ciel. Je l'observe, je l'admire...je le ressens.

Voir la pièce jointe 17787
Photo prise par Jo lors d'une autre "truffade"​


De ses millions de rayons dorés, il pénètre peu à peu ma peau... Je suis en pleine extase. Je me laisse complètement envahir, et bientôt je ressens une énergie extraordinaire s'accumuler en moi. La chaleur transcende mon corps, je brûle de mille feux...mais c'est si agréable. La sensation qui me parcoure me semble alors déjà vécue, et des souvenirs flous refont surface : ce sont les moments de ma vie où j'ai pleinement aimé. Après une quinzaine de minutes intimes, mon corps est maintenant chargé d'une intense énergie, et ce que je ressens est proche de l'orgasme. Je sens que je dois l'exploiter : je me lève, et mon corps semble plus léger, tout devient plus facile...soudain, je cours. Aussi vite que je le peux. Je cours si rapidement que je vois l'environnement autour de moi flou.
A travers champs, je ressens la vitesse autour de moi, et en moi !




Une fois arrivé à l'abri, essoufflé, je m'assoie. Les gars sont encore en train de tripper, Camille, la bouche ouverte, contre un mur; Jo, lui semble méfiant, mécontent, il a les sourcils froncés : il a peur des visions qui s'ouvrent à lui, je me dis que c'est dommage; Pierre, lui, c'est l'opposé ! Il est émerveillé pour un rien, a les yeux grands ouverts, rigole comme un effréné et dit des trucs bizarres. Avec toutes ces émotions, je m'allonge sur le sol en bois de l'abri. Les planches ondulent, grossissent...Je lève la tête vers la charpente en bois du toit... ça y est, les effets sont à leur apogée: les planches de la toiture se meuvent dans des mouvements de vagues, puis s'enflamment dans des tournures multicolores. Ce spectacle est fantastique, surréaliste, il m'émerveille; je n'ai jamais rien vu de tel. Cette vision demeure, et s'associe au rythme de la musique de l'ampli de Marius.

Voir la pièce jointe 17790
Photo de l'abri, automne​


La musique m'entraîne, elle me semble provenir de l'intérieur même de ma tête. Je me relève, et je n'ai rien à faire: ce n'est pas moi qui danse, c'est mon corps tout seul. En fait, avec les truffes, je ne réfléchis plus inutilement, je suis pleinement moi-même. Marius ressent la même chose. On danse ensemble, on s'observe, on se marre, on se laisse complètement aller...on VIT. Apparemment, je lui ai parlé de miroir, et c'est d'autant plus étonnant qu'il me dira plus tard que lorsque j'étais en pleine "truffade", il se retrouvait en moi, dans ma manière d'être. Ça me fait plaisir, c'est un sacré personnage ce "Blue Purple Fox" !


Puis, j’entends un grincement de bateau, qui m'est familier... Des Armes.




Le poème de Léo Ferré chanté par Noir Désir. Cette chanson me prend habituellement aux tripes alors là...! Je la chante entièrement, avec plus d'émotions que jamais. Et à la fin je crie : « Des armes !! Des aaarmes ! » Les gars m'observent sans rien dire, Marius a un sourire au coin des lèvres, en tant que comédien, je pense qu'il apprécie. Mais je ne sais pas ce que les gens autour de moi pensent, et pour une fois je ne cherche pas à toujours comprendre, analyser...peu importe ce que les autres pensent, moi, je suis ! ...et putain qu'est-ce que ça fait du bien. Bon, par contre c'est paradoxal, car à certains moments de mon trip j'ai fait des rétrospections, je me suis analysé, je me suis vu tel que les autres me voient...et c'est d'autant plus paradoxal qu’à d'autres moments je ne parvenais plus à savoir à quoi je ressemblais physiquement, ce que j'étais réellement.
« Je est un autre »


Camille part, je ne le connaissais pas mais il était sympa. Il doit être environ 21h30, à vrai dire, dans ces moments-là, la notion de l'espace et du temps « n'existe plus », ou plutôt est extrêmement différente de la vie habituelle. Le temps s'écoule bien plus lentement, « le soleil ne se couche plus », nous avons l'impression. Et les souvenirs récents antérieurs à ma prise de truffes se mélangent, sont confus dans mon esprit : j'ai fais un bac blanc de sciences ce matin ? C'était bien moi ? Ce n'était pas un rêve ? Est-ce que cette action a une réelle importance dans ma vie ?
Comme je l'avais prévu, les 15g ne sont pas pour moi une dose trop forte, je parviens à me contrôler encore parfaitement. Mais...je reste curieux de découvrir cette perte de contrôle, la perte de sa propre identité afin de réaliser une profonde introspection spirituelle. Quoiqu'il en soit, après quelques instants indéfinis dans le temps, je repars faire une promenade en solitaire.
Pieds nus, cette fois-ci, mes pas me portent vers la forêt dense, aux arbres dansant dans le vent. ♫ « Retour à la nature ! » avais-je crié lors de ma première légère truffade avec J. C'est un peu ça, on se sent vraiment proche de la nature. (On ne l'est malheureusement plus assez aujourd'hui, enfermés dans nos villes...) Je répétais aussi « C'est atemporel! » et « Les choses ne sont pas telles qu'on les perçoit normalement! »...comme quoi on reste lucide sous truffe ! Je dirais même qu'on le devient. A l'intérieur de la forêt, aux arbres dont les troncs mesurent une vingtaine de mètres, il pleut encore.


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Photo de la forêt, automne​


L'épais feuillage tout là-haut a dû accumuler des perles de pluie, qui ruissellent le long de mon visage levé au ciel...Des larmes, peut-être, se mêlent aux minuscules torrents qui se déversent le long de mes joues. Comme c'est doux... Maintenant, c'est au cycle de l'eau, qui nourrit les arbres, et les êtres vivants, c'est à la vie, que je pense avec un certain discernement: comme si je pouvais percevoir à travers le sol les liaisons entre l'eau et les racines de l'arbre. De mes bras, je l’enlace, et je colle mon corps contre lui, le visage de profil contre lui, je ferme les yeux, et j'écoute son grincement, sa lente et solennelle respiration. Après un certain moment, j'ouvre à nouveau les yeux, et fais une découverte pour le moins étrange: Un baby-foot humain.


Non non, ce n'est pas une hallucination, il est bien là, se dresse devant moi : formé par des poteaux en bois, des grandes barres en fer sont fixées au milieu du terrain, avec des empreintes de peintures comme indication où poser les mains. Bien qu'il soit fermé, je saute par-dessus les poteaux sans problème. Et au milieu d'un baby-foot à l'échelle humaine, cette fois-ci encore, sans le vouloir, je réfléchis profondément... Je songe à la taille de l'homme à l'échelle de l'univers, la disproportion de l'homme, l'infiniment petit, l'infiniment grand...qu'est-ce qu'un homme dans l'infini ? Est-ce
que la matière se perpétue indéfiniment ? Est-ce que la fin existe en cet univers ? Y'a-t-il d'autres univers ? « Les deux infinis », le texte des Pensées de Blaise Pascal m'apparaît bien plus clairement.
J'ai la conviction que les surréalistes et certains de mes poètes favoris eurent recours à des substances similaires afin de devenir « voyant », par un « dérèglement de tous les sens » tel que le décrivit Arthur Rimbaud.


Liens pour les intéressés: Les deux infinis - Les penses de Pascal
Lettre d'Arthur Rimbaud à Paul Demeny, dite lettre du « voyant » - Des Lettres


Je suppose que cela fait maintenant longtemps que je suis seul, les gars risquent de s'inquiéter, je retourne alors à l'abri. En sortant de la forêt, j'aperçois le soleil couché sur l'horizon : il est rouge électrique, toujours aussi majestueux. Les couleurs sont accentuées, saturées !
Si le soleil commence à s'effacer du ciel, il doit être maintenant environ 22h. Jo est toujours anxieux, il me dit qu'il a perdu son portefeuille. Dans ces moments-là, chez lui, comme chez beaucoup de personnes, un simple problème peut ruiner tout le trip... Car chacune des émotions que l'on ressent est amplifiée. Je parle du baby-foot humain à Marius, au début il ne comprend pas, pense peut-être que j'ai des hallucinations bizarres, mais curieux, désire finalement le voir. Je l'y emmène.


De retour dans la forêt, il est émerveillé tout comme moi lorsque j'y suis venu plus tôt. Il me dit qu'il aurait dû aller se balader, au lieu de rester à l'abri. Lorsqu'il voit le baby-foot géant, il est étonné, il n'avait aucune idée de ce à quoi cela pouvait ressembler. A l'intérieur, lui aussi trouve le lieu mystique. Il me regarde sauter entre les barres, et déblatérer des pensées philosophiques. Marius prononce une phrase qui me marque : « Tu peux que le ressentir, tu ne peux pas le décrire », il soulève en fait des questions intéressantes : faut-il simplement ressentir les effets, et se laisser aller, ou tenter d'expliquer aux autres ce que l'on ressent, pour partager nos émotions, comme dans un trip-report ? Ou bien encore : Le langage n'est-il pas réducteur de nos émotions, qui sont indescriptibles ? Peut-on et doit-on essayer d'expliquer ce que l'on ressent ? On discute un peu avant de revenir avec les gars à l'abri. Jo me crie qu’il va mieux, un grand sourire aux lèvres : il a retrouvé son portefeuille, qui était dans son sac, qu'il portait sur son dos depuis le début ! Il peut maintenant profiter des effets de son voyage, allongé sur le sol avec Pierre, ils se marrent, crient, et admirent l'environnement : les jardins de la Gloriette sont aussi un endroit magnifique.


La nuit commence à descendre légèrement, et les effets eux aussi...selon moi c'est lié. Sur le sol de l'abri, près des tentures, on découvre un sachet de truffes ouvert. Impossible de savoir à qui c'est, mais ni Pierre ni Jo ne veulent en reprendre. Bien qu'il n'en reste que très peu, Marius, Maxime et moi décidons d'en reprendre un petit peu chacun ; ce serait dommage de faire du gâchis, ça ne se conserve pas. Maxime sait que cette quantité ne lui fera pas d'effets importants et qu'il pourra continuer à veiller sur nous, mais c'est juste histoire de truffer un peu avec nous !
La confiture ayant été finie (et le pot éclaté sur le sol par Pierre dans un état de dégénérescence joyeuse), on en mange un petit morceau sec chacun, mais le goût est infâme ! On reste alors un peu tranquille, à écouter de la musique, comme Lost, de Noir Désir encore. On entend tous les trois une musique de Pink Floyd dont le son devient excessivement grave, et se distord. On se marre, on ne sait pas si ça vient de nos esprits en connexion spirituelle ou simplement de la musique. Je me lève, et après avoir dansés ensemble, je me déplace hors de l'abri afin d'observer le ciel. Les nuages sont en formes de cristaux de flocons de neige, et ce même motif se répète un peu partout, couvrant la moitié du voile infini des cieux. L'autre moitié de mon champ de vision céleste est empli d'étoiles qui se relient entre elles, formant des constellations, et tout comme les blanches traces d'avions qui flottent dans l'atmosphère, elles semblent particulièrement proches, comme si elles étaient à une centaine de mètres de moi seulement.


La nuit noire commence à envahir l'espace (il doit donc maintenant être environ 23h), et la lumière commence à nous manquer...je pense que ça a un impact sur notre humeur. On commence à devenir un peu inquiets, et tristes à l'idée que ce voyage atemporel se finisse. D’ailleurs lorsque l’on est en groupe, sous truffe, ce sont souvent quelques détails qui influent sur l’humeur générale : la musique joyeuse nous rend heureux, nous fait voyager à nouveau, et dès qu’elle est triste, nous aussi, et des pensées sombres nous envahissent. Cela fonctionne aussi avec l’humeur de l’un d’entre nous, par exemple, si l'un se sent inquiet, ou contemplatif, les autres aussi…c’est ce que j’appelle les connexions spirituelles. Un exemple flagrant est, pendant la redescente, une sensation désagréable de brûlure dans la gorge, que Maxime et moi avons partagé au même moment alors que Jo fumait une clope près de nous. Et pourtant Maxime avait à peine mangé une truffe ! J’ai constaté l’influence de l’humeur surtout pendant la redescente, qui comme toujours est assez triste.
Heureusement, il me reste encore quelques effets visuels : au loin, les phares des camions sur la route, à mes yeux, apparaissent tels des "chats-bus" capables de disparaître soudainement ! Un peu plus tôt, j’ai aussi vu cinq silhouettes géantes noires marcher en haut d’une colline.
Je pense que ces visions, ou plutôt déformations de la réalité, toutes droit sorties de l’univers de Miyazaki, sont liées à l’air de guitare joué par Maxime au début de la soirée.


Privés de lumière, on se rassemble tous les cinq à l’endroit où l’on a consommé les truffes. On a décidé de se rassembler car certains d’entre nous, à cause du retour à la réalité, souhaitaient rentrer chez eux, sans vraiment savoir pourquoi. Ensemble, on se sent un peu mieux, et on souhaite partager ensemble les derniers instants de notre truffade mystique.
Malgré tout, certaines pensées vraiment sombres me préoccupent : le fait que ma vie avant la prise de truffe n’avait pas de sens réel ; que je n’ai pas de but dans la vie ; que la routine va revenir et que de retour dans la société je vais devoir vivre comme tout le monde, je ne vais plus pouvoir m’exprimer aussi vivement, vivre pleinement… Je me suis même senti proche de la mort, je n’ai d’abord pas osé le dire aux mecs, de peur qu’ils pensent que j’avais des idées suicidaires, mais j’ai essayé de leur expliquer : Je me sentais proche de la mort car je n’avais plus peur d’elle. Je n'avais plus peur de ne pas avoir pleinement vécu ma vie. Et si je mourrai ce serait en paix, dans le monde du paroxysme de ma contemplation.




Pierre part. Jo sort de son sac son diabolo luminescent, il y a des petites diodes multicolores dessus. Plongés dans l’obscurité, on observe les rayons multicolores qui se dessinent dans la pénombre. Chacun notre tour, on le fait tourner dans tous les sens, sans vraiment faire du diabolo, juste à toute vitesse pour dessiner provisoirement dans l’air.


Voir la pièce jointe 17789


Lorsque vient mon tour, je danse, je dessine, et je tente d’expliquer aux gars un poème que j’avais écrit en classe de troisième, dans lequel je me mettais à la place de la peinture. Plongé dans mon univers poétique, je ne dois pas être très clair, car bien qu’ils soient intéressés, ils ne comprennent pas vraiment.
Je souhaite partager ce poème ici car on peut s'identifier à cette peinture, qui se questionne, et qui ne parvient pas à s'extirper de la toile, tel l'esprit éclairé dans la société.


Je naît,
je vis,
je suis créée,
je suis peinte,
je deviens,
j'existe,
j'apparaît,
je vois le jour,
je suis exposée,
je viens au monde,
le monde vient à moi.
Comment puis-je en être consciente ?
Je ne le sais pas.
J'ai une pensée, j'ai une conscience, mais je ne suis que peinture.
Je ne suis que matière, je suis inanimée, les gens me penseront inexpressive.
Je ne peux exprimer mes sentiments, mes émotions.
Seul le peintre a le pouvoir de représenter ce qu'il ressent.
Ce qu'il ignore, c'est qu'en créant son œuvre, il crée des émotions, il crée mes émotions.
Celles que je ne peux exprimer, que je ne pourrai jamais exprimer...
Jamais personne ne me comprendra.
Jamais personne ne se mettra à ma place, et ressentira tout ce que j'ai en moi.
Cette perpétuelle envie de liberté...


Mon existence sera consacrée à être observée par les passants, qui eux sont libres.
Ma vie ne sera qu'envie et jalousie.


Je n'ai pas de liberté, et je n'en aurai jamais.
Je resterais là à vie, condamnée à l'immobilité.
Les gens libres pourront m'observer, m'interpréter.
Certains ressentiront, mais jamais personne ne comprendra ma douleur, ma souffrance face à ma captivité.
Ma dépendance à cette toile.​


Il est minuit passé, et nous prenons conscience, avec mélancolie, que les effets ont disparus. On décide de rentrer chez nous. En marchant sur les sentiers pour sortir de la Gloriette, on se remémore les meilleurs moments de notre truffade flamboyante. Y'a pas à dire, c'était vraiment sensationnel. Nous partageons nos sentiments, et vérités sur le monde que l'on a vécu grâce à ces petites truffes magiques. Puis on se sépare...
Déambulant dans les rues sombres, sous l'immensité des cieux, mes vérités se perdent peu à peu, je ne parviens plus à les formuler, alors qu'elles me semblaient si claires quelques heures auparavant : J'ai effleuré du bout des yeux et de l'esprit une sorte de vérité... cette vérité est que chacune des pensées, des vérités que l'on peut découvrir est en fait inutile... elle se perd dans un cycle éternel. Un cycle, car le fait d'avoir cette pensée forme une boucle universelle...


C'est la fin de l'utopie, bienvenue dans... la réalité ?

Lobo
 

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Psychopstick
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Bien écrit ce TR. C'est marrant d'avoir tout le temps envie de danser, de bouger, d'escalader des trucs. Ça me fait pas du tout pareil, d'habitude je trippe seul, et c'est bien sûr beaucoup plus introspectif, moins jovial.
Les photos sont sympas, ça met un peu de visuel dans le TR.
Miyazaki, c'est magique pendant un trip, le chemin du vent passe très bien aussi^^.

Tu t'es posé pas mal de questions, mais tu as eu des réponses aussi?
Envie de recommencer?
 

Lobo.

Neurotransmetteur
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Merci, oui bien sur j'ai déjà recommencé cet été, c'est de la que vienne certaine photo, et c'était toujours une sorte de retour à la nature en pleine campagne au bord d'un étang. Mais je compte faire un nouveau voyage dans moins d'un mois, cette fois-ci seul afin que ce soit plus intime, introspectif et spirituel.

Pour les réponses, oui, j'ai eu quelques révélations, "vérités", mais qui comme je l'ai écrit se sont peu à peu effacées de mon esprit en retournant en ville. Sinon pour la plupart des questions que je dans le tr, elles m'ont menées a des raisonnements qui seraient trop long et trop dur à rédiger ! :)
 

Virgule

Neurotransmetteur
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6 Sept 2015
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Beaucoup de littérature et d'enthousiasme dans ce récit, ça m'a donné le sourire.
Si tu t'intéresses au rapport entre poésie et drogue, tu peux essayer de lire Michaux, Misérable miracle (ou autre) si tu ne connais pas déjà, c'est très beau. Il consommait de la mescaline et du lsd.
Mon poème préféré de lui (qui n'a pas grand rapport avec la drogue, même si on peut faire des liens): Clown, Henri Michaux - Semenoir
 

Piano-bar

Elfe Mécanique
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Virgule a dit:
Beaucoup de littérature et d'enthousiasme dans ce récit, ça m'a donné le sourire.
Si tu t'intéresses au rapport entre poésie et drogue, tu peux essayer de lire Michaux, Misérable miracle (ou autre) si tu ne connais pas déjà, c'est très beau. Il consommait de la mescaline et du lsd.
Mon poème préféré de lui (qui n'a pas grand rapport avec la drogue, même si on peut faire des liens): Clown, Henri Michaux - Semenoir

Il est magnifique ce poème.

Merci pour la découverte !
 
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