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[1P-LSD] 80 µg, une complétude solitaire.

Tridimensionnel

Holofractale de l'hypervérité
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27 Avr 2016
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Bonjour et bonsoir, je viens partager avec vous un trip datant de cinq jours. Il ne contient rien de révolutionnaire mais peut intéresser celleux qui s'interrogent par exemple sur la durée des effets du 1P, ou sur l'intérêt de triper seul (j'ai vu un topic sur le sujet traîner ces derniers jours).

Produit: 1p-LSD
Dosage: 80 µg, avalés.
Set: je suis indifférent. Je trip ce jour-là parce que les conditions sont réunies pour, sans passion.
Setting: seul dans ma chambre, ma guitare, de la gouache et un crayon sous la main, de bonnes musiques à portée de clic.

T : Je gobe.

T+10 minutes : je remarque une légère modification de mes perceptions. Le temps est plus large, je plane en regardant autour de moi. Je me dis alors que les drogues auraient pour principale fonction de nous expulser du temps quotidien, celui qui nous piège dans la toile du présent + futur, devoirs + attentes, ruminations + expectatives. Nous sommes sans cesse en train de prévoir, planifier, et pour ma part j’en viens à me sentir vaguement coupable lorsque je « bulle » - coupable de ne pas être en train de lire, d’apprendre, de faire tout ce que j’ai prévu de faire depuis des mois et des mois. Tandis qu’une fois le carton avalé, c’est parti pour quelques heures de « présent » : on a enfin une bonne excuse pour se concentrer sur nos sensations, sans aucune productivité.

T+30 minutes : début de la montée. Ma vue se trouble, mes gestes deviennent maladroits, saccadés. Ma bouche se remplit d’acidité et d’une légère amertume, comme si j’avais faim. Mon ventre m’envoie des sensations par vagues. Normalement j’adore ça, mais c’est un peu plus puissant que d’habitude et je comprends pourquoi certains trouvent cela inconfortable. Je me cale dans mon lit avec un casque et j’enclenche les musiques prévues.

T+40 minutes : rien à faire, y’a un truc qui cloche. La musique n’a pas l’effet escompté, je n’arrive pas à lâcher prise. Pourtant, sobre, je m’étais dit que j’allais adorer écouter ça. Mais c’est comme si mon esprit refusait de se laisser emporter. Ça m’angoisse, et je commence à sentir la peur grandir. Je ressens beaucoup trop la différence entre ce que je suis censé ressentir et ce que je ressens réellement. À ce stade j’aurais pu changer de musique mais je n’ai plus du tout confiance, je préfère reposer mon casque et me concentrer sur moi-même.
La montée continue, des vagues m’emportent en me faisant me tordre de plaisir dans mon lit, avec l’angoisse ça fait un drôle de mélange, et je finis par trouver une certaine jouissance à ce nœud dans mon ventre. Les ondes de chaleur sont comme des pilons qui me clouent à mon matelas, je ne peux même pas envisager de prendre mon ordi pour regarder de belles choses. Même si je me sens mal, à aucun moment je ne panique, parce que je sais que le trip sera court, et parce que je suis chez moi, en sécurité. Je commence à me sentir très puissant, c’est évident que je ne pouvais pas compter sur un setting stéréotypé (musiques de tripés, …) pour vivre correctement mon trip, je suis seul avec moi-même et je dois m’accepter en entier.
En fin de compte je ne prête plus attention qu’à ma respiration, à chaque inspiration mon diaphragme descend dans mon ventre en me massant les viscères, c’est tellement agréable que je manque de me pisser dessus.

T+1h : je gratte quelques notes, dessine. Les traits viennent naturellement, je suis désinhibé dans mon dessin, ça me fait du bien. Je me plonge dans la contemplation de quelques objets.

T+2h : ma montée est finie. Je regarde les surfaces onduler, c’est sympathique. Je laisse les ondes prendre de l’ampleur… Et patatra ! Tout tombe cul par-dessus tête. Je me laisse complètement surprendre. J’ai des posters sur mon mur, et c’est un énorme carambolage, les pieds sont à la place des nez et des morceaux de cheveux tournoient dans l’espace. Ma première réaction est : « ouahou, c’est tellement réel ! ». Ma seconde de réaliser que j’ai intoxiqué mon cerveau pour le couper de la réalité x) je m’arrache à l’image, et suis très rassuré de voir que tout est normal autour de moi. Un peu calmé, je suis curieux, et me replonge dans les images.
J’essaye d’analyser mes hallus, et parviens à cette conclusion : l’image est toujours la même, mais elle est « déplacée » sur mon champ de vision et j’interprète ces changements de places comme des mouvements (comme au cinéma !). D’où ces mouvements « infinis » : l’oiseau vole indéfiniment vers la mouche tandis que les nuages s’éloignent sans fin du soleil… Aussi, la même image se superpose plusieurs fois comme un mauvais collage, ce qui explique que la mouche se retrouve parfois dans les nuages. Une fois que j’ai compris ça, je peux me mettre à jouer avec mes hallus, en les faisant aller dans un « sens » ou dans l’autre : les nuages s’approchent, puis s’éloignent du soleil, puis s’approchent à nouveau… L’oiseau vole à reculons… Je suis au cinoche, c’est super !
Au bout d’un moment le mécanisme se grippe, les images sont de plus en plus souvent coincées entre deux « sens », et se mettent alors à simplement vibrer comme un méchant bug. Je laisse tomber.
Je fixe les surfaces blanches, et j’y fois des formes compliqués, des fractales pointues… C’est comme dans tous les mythes sur le LSD haha, je n’avais jamais vécu ça encore !

Je me sens assez fier de moi, après l’angoisse de la montée et le choc des hallus je me sais maître de mon trip, en tout cas pour l’instant. Un petit air de victoire trotte dans ma tête, quelque-chose comme : « tu l’as fait mec, face à toi-même tu as survécu ». En dehors de ce sentiment, je ne ressens pas grand-chose. Et c’est ce qui m’a le plus marqué dans ce trip : en dehors de la montée difficile et de cette vague fierté, je suis atone, j’ai même pensé à des choses qui auraient pu me rendre très triste sans quasi aucune émotion. Je ressentais bien de la tristesse mais elle était loin de moi, je pouvais l’apprécier comme un objet, et la rejeter lorsqu’elle me saoulait. Je regarde l’heure : il est

T+3h : c’est tout ?? J’en ai marre de mes posters, je retourne me coucher. Aucune idée de ce à quoi j’ai pu penser dans les deux heures suivantes. Peut-être que je me sentais juste bien. À ce stade j’aurais pu remettre la musique mais je n’y ai simplement pas pensé.

T+5h : la descente s’est amorcée. Je suis capable d’écrire à des potes en sachant qu’ils ne remarqueront rien d’étrange. De temps en temps je regarde mes posters, en me concentrant je peux faire revenir les ondes et les hallus. Mais c’est de plus en plus difficile et je m’en sers comme jauge de ma descente.

À T+6h j’étais quasiment normal. J’ai cessé de regarder l’heure.

Par la suite j’ai pu aller en soirée sans que qui que ce soit ne soupçonne mon état. Prendre le métro a été difficile, tous les voyageurs sans exceptions avaient des têtes flippantes, ou des expressions d’abrutis, la laideur m’environnait c’était dur (sans parler de ce mec chelou de la ligne 5, qui m’a fixé en grelottant pendant quinze stations alors qu’on crevait de chaud dans la cohue…). Mais le contact humain me donnait envie de rire, je savais que c’était de l’euphorie lysergique, alors même que je n’avais rien ressenti de tel pendant le trip.

Le lendemain j’ai vécu une violente absence de motivation et une impression de non-sens, qui se sont estompés dans la soirée. Les CEV n’ont même pas duré 24h.
Aucun sentiment de séquelle depuis.

Conclusion : ce trip en intérieur, seul, valait bien une expérience en laboratoire, pris comme tel il était instructif. Mais j’ai de bien meilleurs souvenirs de voyages en pleine nature, avec des amis. Peut-être que seul en pleine nature serait un compromis intéressant. En tout cas je ne referai pas ça dans les prochains temps. Le goût d’inachevé est trop fort, peut-être ne suis-je pas encore prêt à triper intérieurement.
Le soleil, les végétaux, la couleur du ciel m’ont manqué.
 
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